Cultures marines n°268 - (Page 27)

saison des moules Dossier Bouchot de Normandie : une qualité mal rémunérée Dès mars, les mytiliculteurs normands ont commencé à commercialiser les moules invendues de l’an dernier. « Le taux de chair et la taille des coquilles étaient très satisfaisants, déclarent unanimement les producteurs. Mais le prix n’a pas été conforme aux attentes. » Ce regain de qualité de la moule normande est dû aux efforts faits par la profession avec un taux d’ensemencement de 70 % mais aussi une hauteur maximale d’ensemencement des pieux. Ces mesures ont été respectées par les professionnels, bien conscients du déficit de qualité des productions normandes. « Débuter la saison de commercialisation à 1,25 € le kilo laisse présager des cours à venir encore plus bas. Les mytiliculteurs constatent amèrement qu’ils ne sont plus maîtres de leur vente, déclare Maurice de Saint-Denis, président de l’organisation des producteurs. Actuellement, 70 % de la production va à la GMS et le marché est entre les mains de trois grossistes : Cultimer, Mytilimer et Kermarée. Ces entreprises imposent un prix encore plus bas au risque de rester avec des invendus. On constate un manque de cohésion dans la profession. Il est primordial que l’on se structure l’an prochain. » Une réunion devrait rassembler tous les producteurs, en mars 2014, pour qu’ils puissent fixer un prix. Les Normands reprochent aussi un déficit de communication autour de la spécialité traditionnelle garantie (STG). Interrogé à ce sujet, Jo Costard confirme que « la STG est un signe de qualité européen donc la communication viendra du Comité national de la conchyliculture (CNC). Actuellement, le comité régional possède un budget publicitaire dédié aux moules de 50 000 €. Or 30 000 € vont directement au CNC, le reste a été investi en grande partie à la gestion du dossier STG. Il ne reste donc que peu de moyen pour la publicité régionale ». Ingrid Godard Manque de communication « Les mytiliculteurs ne sont plus maîtres de leur vente », déplore Maurice de Saint-Denis. Avec l’arrivée de cette STG, les Normands demandent la création d’une commission moules de bouchot STG. Pour pallier au manque de signalétique, des mytiliculteurs ont décidé d’imprimer par eux-mêmes des affiches qu’ils distribueront à leurs revendeurs traditionnels. Au regard du prix d’orientation de l’an dernier et du marché actuel, l’or- ganisation professionnelle a diminué de 12,5 % le prix d’orientation pour la saison 2013. Il préconise donc 1,60 € HT au kilo (150 unités) départ de moules lavées net mareyeur, conditionnées en sac de 15 kg. Par 10 unités de moins au kg, le prix augmente de 10 centimes. Ingrid GODARD Bretagne Nord : la moule de deux ans débute la saison moules de deux ans qui n’avaient pas trouvé preneur en 2012. De bonne taille, ces « deux ans » présentent autour de 100 à 110 bêtes au kilo. Un chiffre qui passera à 120130 bêtes quand les mytiliculteurs de la baie attaqueront les moules de l’année. En baie de l’Arguenon, la stratégie est identique. À la tête d’une bonne quantité de moules de deux ans, les producteurs inondent les circuits de commercialisation avec ce produit bien rempli. « Le problème c’est que, de peur de se retrouver avec des invendus, ils le bradent parfois », reproche Guillaume Bou- Bruno Saussier En Bretagne, la saison de commercialisation commence à peine. À l’est, la baie du mont Saint-Michel attend impatiemment le résultat de la dégustation test qui déclenchera l’appellation AOP moules de bouchot de la baie du mont Saint-Michel. Laquelle pourrait tomber dans les derniers jours de juin. Sinon il faudra patienter jusqu’à la prochaine marée, autour du 10 juillet. « Plus l’AOP tombe tôt et plus ça signifie que notre produit est en avance, ce qui entraîne une saison plus longue et un chiffre d’affaires potentiel plus important », souligne Patrick Jagou, gérant de la société de transformation Mytiléa au Vivier-sur-Mer. En attendant, les professionnels doivent se contenter de commercialiser leur produit sous l’appellation suivante : moules de bouchot du Vivier-sur-Mer, baie de Cancale. Une dénomination qui, bien que moins flatteuse d’un point de vue marketing, garantie toujours un positionnement haut de gamme et un bon taux de chair. D’autant, qu’à l’image des bassins voisins, Mytiléa a commencé la saison en vendant les chonneau, de l’entreprise éponyme. Une stratégie pessimiste. D’autant que les prix de vente de ce début de saison sont calqués sur les mauvais prix de la fin de saison 2012. « Cette année va être assez compliquée après deux mauvaises saisons en termes de pousse et de qualité, prévoit le mytiliculteur. La Charente nous a fait du mal l’année dernière avec un beau produit, mais on sent dernièrement un rapprochement de la grande distribution sur notre région. » Seule crainte pour les producteurs de moules costarmoricains : démarrer bas la saison et ne pas réussir à remonter les prix. Début de saison à deux vitesses avec d’un côté les grosses moules de deux ans et de l’autre les petites semées en 2012. En baie de Lannion, les mytiliculteurs ont démarré eux aussi avec la moule de deux ans. « L’épisode d’Alexandrium de l’année dernière nous a laissé près de 100 tonnes de stock. Ce qui n’était finalement peut-être pas si mal car on se retrouve aujourd’hui avec un produit de 80 à 90 bêtes au kilo avec un très bon taux de remplissage », se félicite Thierry Larnicol, à Plougastel-Daoulas. À Logonna-Daoulas (Finistère nord), Nicolas Le Moal démarre sa saison avec 160 tonnes de moules de deux ans. « Un stock inhabituel avec environ 22 % de taux de chair, ce qui représente un retard de 45 jours sur la moyenne. » Lui aussi compte tenir ainsi entre 4 et 5 semaines afin de laisser aux moules de l’année le temps de prendre des forces. Enfin, à Logonna, sans stock de l’année précédente, Stéphane Nicol joue la montre pour proposer un produit mieux rempli. « Nous avons trois semaines de retard, comme les fruits et légumes. » Bruno SAUSSIER Cultures MARINES n°268 - juillet-août 2013 27

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