Cultures marines n°268 - (Page 32)

saison des moules Dossier D’année en année, la popularité du coquillage noir ne se dément pas. Néanmoins, les ventes peuvent fluctuer en fonction de la qualité des premières moules qui arriveront sur les étals. Stéphane Hesry, président de Cap à l’Ouest, en a parfaitement conscience. « Si elles déçoivent, les consommateurs n’y reviennent pas. » Depuis plusieurs années, le mytiliculteur n’a eu de cesse de garantir une qualité et de la promouvoir auprès du public en se battant notamment pour faire reconnaître la moule de bouchots AOP de la baie du mont Saint-Michel. Cependant, depuis trois ans, il a aussi pu entendre des insatisfactions de clients, notamment traditionnels, sur la qualité de l’AOP. Les propos de certains poissonniers ne l’ont pas laissé indifférent. « Nos clients s’en moquent de l’AOP si la moule est belle. Ce qu’ils veulent, par contre, c’est la baie du mont SaintMichel », a ainsi déclaré le responsable de la poissonnerie Dolodec. Stéphane Hesry a donc planché sur le projet d’une moule qui serait « le meilleur de la bouchot ». Une moule baptisée la Morisseau, du nom de jeune fille de sa mère. Destinée aux circuits traditionnels, poissonniers et ambulants, son cahier des charges garantit un taux de chair de 30 % contre 25 % pour l’AOP et surtout 0 % de moules d’une taille inférieure à 4 cm, quand l’AOP ne garantit qu’un pourcentage inférieur à 20 %. Son prix de vente dépasse de 50 centimes d’euros par kilo celui d’une moule standard. Si l’écart est important, il n’est pas rédhibitoire pour la clientèle ciblée par les poissonniers. Surtout, il s’explique par le soin apporté à la production : moins d’individus par pieu, temps de production plus long, suivi hebdomadaire du taux de chair, tri et calibrage plus précis. Sur les 1 000 tonnes produites par Cap à l’Ouest, 20 % seulement répondraient aux critères de la Morisseau à laquelle il dédie 30 % de sa concession : la zone super-est de la Baie. Et tant que les critères du cahier des charges ne sont pas remplis, hors de question de la vendre… La commercialisation de la Morisseau qui a débuté l’an dernier Céline Astruc Cap à l’Ouest mise sur la qualité Morisseau Cette nouvelle qualité de moule garantit une taille minimale et un taux de chair supérieur. en test, aurait dû reprendre début juin. Au final ce sera plutôt fin juin que Demarne, Méric et Blanc ainsi que la vingtaine de poissonniers déjà séduits par la Morisseau pourront distribuer le produit probablement disponible jusqu’à fin décembre. Pour autant, Stéphane Hesry ne néglige pas l’AOP. « Aujourd’hui, il faut que les professionnels diversifient leurs activités aussi bien que leurs circuits de distribution pour aller de l’avant. On ne pourra pas produire plus, alors il faut segmenter les marchés », conclut-il. Céline ASTRUC Recyclage : Ovive s’intéresse aux déchets mytilicoles Jusqu’ici l’entreprise ne s’intéressait pas vraiment aux moules. Mais la situation évolue. D’abord Jean-Luc Saunier a des clients qui lui achètent déjà des coquilles d’huîtres pour l’amendement agricole et qui en réclament davantage. De plus, la société a elle aussi DR La société Ovive, installée à Périgny près de La Rochelle, traite déjà depuis 15 ans, sables et coquilles d’huîtres (1). Elle est « de plus en plus » sollicitée pour récupérer également les déchets mytilicoles, témoigne Jean-Luc Saunier, le directeur général. Sa technique de transformation n’est pas encore au point mais Ovive reçoit déjà des déchets de moules. 32 Cultures MARINES n°268 - juillet-août 2013 souffert de la baisse de production ostréicole. Surtout que 25 à 30 % des coquilles d’huîtres provenaient auparavant de la baie de Quiberon. « La qualité n’était pas terrible car il y avait beaucoup de crépidules mais cela représentait par contre de gros volumes », insiste Jean-Luc Saunier. Depuis que la production ostréicole s’est fortement réduite au plan national et encore plus drastiquement dans le Morbihan, Ovive récupère moins de coquilles d’huîtres à traiter. Se diversifier dans les déchets mytilicoles apparaît donc comme la solution idéale. L’équation n’est pourtant pas si simple à résoudre. J e a n - Lu c S a u n i e r a i n v e s t i dans du nouveau matériel car le broyage et le séchage ne sont pas les mêmes que pour les huîtres, la coquille de moule étant beaucoup plus fine. L’objectif est d’obtenir des écailles inférieures à un millimètre pour l’épandage agricole. « N o u s f a i s o n s d e s e s s a i s, reprend le directeur général. Le résultat que nous avons obtenu jusqu’ici n’est pas si mal mais nous n’avons pas encore réussi à avoir un produit finalisé à une échelle industrielle. Il reste des déchets, surtout des cailloux ou du byssus. Ce n’est pas si simple. » Persuadé qu’il y a une ressource intéressante à exploiter et convaincu du potentiel de ce produit directement utilisable en épandage biologique, Jean-Luc Saunier espère finaliser sa technique dans les semaines à venir. Marion LARRONDE-LARRETCHE (1) La part des déchets coquilliers représente environ 30 % du chiffre d’affaires de l’entreprise qui propose par ailleurs du sable, du gravier ou des galets, utilisés par exemple en aquariophilie ou pour l’aménagement de jardin.

Table des matières de la publication Cultures marines n°268

Cultures marines n°268