Cultures marines n°315 - 7

grand angle

Actualité

Le salon de l'agriculture, c'est
l'occasion pour les professionnels
de présenter leurs produits, vaches,
cochons ou huîtres (lire également
pages 48-49). C'est aussi un rendezvous privilégié pour rencontrer
les politiques. Le ministre de
l'Agriculture et de l'Alimentation,
Stéphane Travert, a ainsi échangé
avec une délégation de représentants professionnels, le mercredi
28 février. Une petite demi-heure
de discussion informelle en compagnie de son conseiller pêche et
aquaculture, Olivier Cunin, et du
directeur des Pêches maritimes et
de l'Aquaculture, Frédéric GueudarDelahaye. Face à eux, Philippe Ortin,
le président du Comité national de
la conchyliculture, et les présidents
régionaux du moment, Thierry
Hélie pour la Normandie, Jacques
Sourbier pour les Pays de la Loire et
Philippe Le Gal pour la Bretagne sud.

Attaché à la ﬁlière
« C'est une rencontre brève,
on ne peut pas en attendre
beaucoup de choses concrètes,
confiait Philippe Ortin. Le ministre
nous a rappelé son attachement
à la filière et on a revu avec lui les
sujets auxquels on tenait. » Parmi
ceux-ci, les problèmes sanitaires et la
clarification des arrêtés préfectoraux.
« M. Travert est conscient que la
qualité du milieu est dépendante
des bassins versants et nous a dit
qu'il allait interpeller les mairies, les
communautés d'agglomération,
les départements et les régions
pour les sensibiliser au problème »,
poursuit Philippe Ortin.

Une rencontre informelle avec le ministre

Le ministre a accordé une petite demi-heure aux représentants conchylicoles.

Le sujet des aléas en conchyliculture et de la mise en place d'un
système assurantiel a par ailleurs
été abordé. « Nous avons rappelé
au ministre qu'il fallait que le futur
Feamp puisse abonder ce fonds »,
ajoutait le président des conchyliculteurs. Les représentants professionnels aimeraient par ailleurs que
certains avantages fiscaux puissent
être octroyés avec la mise en place de
ce fonds. Le sujet est à l'étude.
« Nous avons aussi évoqué la
problématique du développement de l'aquaculture au sens
large, a commenté Philippe Le Gal. Il
faut faire modifier le code de l'environnement pour que les quelques
corps morts que l'on installe ne
soient pas comparés à des zones
de mouillage. » Pour le président
de Bretagne sud, l'impact environnemental des filières conchylicoles
n'est pas équivalent à celui d'une

zone de mouillage. Pas de raison,
donc, que les études réclamées
en amont du projet soient aussi
lourdes.

L'enjeu du changement
climatique
Après avoir rencontré les
conchyliculteurs, puis les pêcheurs,
le ministre a fait un bref discours
sur le stand de France filière pêche.
Il a remercié l'ensemble de la filière,
dont l'aquaculture et la conchyliculture, pour son implication dans
les états généraux de l'alimentation. « Je sais que vous êtes tous
et toutes ici mobilisés pour un
plan de filière très ambitieux »,
a-t-il déclaré.
« Les aquaculteurs français font
face aujourd'hui à des obstacles
qu'il faut surmonter, a-t-il pour-

suivi, et nous allons les accompagner. Pour la conchyliculture,
je retiendrai entre autres, l'enjeu
du changement climatique qui
entraîne une augmentation des
facteurs de risque pour le secteur.
Il faut s'y préparer, s'organiser
pour trouver des réponses qui
soient adaptées. C'est en cours à
travers notamment le développement des outils de gestion des
risques. »
Première rencontre officielle
avec le ministre puisqu'il est fraîchement élu en Normandie, Thierry
Hélie avait déjà échangé plusieurs
fois avec Stéphane Travert, par
ailleurs député de la Manche. Il
souligne sa « qualité d'écoute »
et sa « connaissance du secteur ».
« Quand il parle de conchyliculture, il est dans son jardin. »
Marion LARRONDE-LARRETCHE

Mortalités : pas d'indemnisation sans preuve
Difficile d'accuser l'État d'inaction,
si l'on ne peut pas prouver qu'il
aurait dû agir. C'est la situation qu'a
rencontrée l'entreprise B, déboutée
de sa demande d'indemnisations
pour les mortalités de ses huîtres.
Reprenons le fil. L'EARL B exerce
une activité de mytiliculture-ostréiculture. À partir de juin 2012, cette
société a connu un épisode exceptionnel de mortalité de ses huîtres
avec une perte de chiffre d'affaires
de 184 800 euros.
Pour l'EARL B, la cause du sinistre
est la modification des courants
marins, et cette modification s'ex-

plique de deux manières. D'abord,
dans une parcelle voisine, un mytiliculteur a implanté des pieux pour
moules de bouchot dont l'implantation ne respecte pas l'écartement
minimal de deux mètres entre deux
pieux. Ensuite, d'autres parcelles
proches de celles de l'EARL B se
sont retrouvées à l'abandon. En
a résulté un envasement et une
accumulation impor tante de
coquilles d'huîtres formant un épi,
pouvant également avoir un lien
avec la modification des courants
marins. L'entreprise porte l'affaire
en justice en demandant à l'État

de l'indemniser de son préjudice
pour carence à faire usage de ses
pouvoirs de police.

Pas de lien de cause à effet
En effet, l'État aurait dû, d'une
part, contraindre l'ostréiculteur
voisin à enlever les pieux installés
sans autorisation sur le domaine
public maritime, et d'autre part,
prendre des mesures pour mettre
fin à la situation d'abandon de
certaines concessions ostréicoles
situées à proximité de son exploitation.

Mais la cour administrative
d'appel de Nantes, dans son arrêt
du 26 janvier 2018, ne donnera pas
suite à la demande du plaignant.
En effet, les juges estiment que
l'expertise n'établit pas avec certitude le lien de cause à effet entre
les parcelles litigieuses et l'épisode
de mortalité. Par conséquent, la
responsabilité de l'État, liée à une
carence dans l'exercice de son pouvoir de police, ne sera pas recherchée et l'EARL B a été déboutée
de ses demandes d'indemnisation.
Edmond BRENOLIER
Cultures MARINES n°315 - avril 2018

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