Cultures marines n°316 - 4

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Au nord, au sud, même combat :

Marion Larronde-Larretche

Les Charentais perdent des
entreprises, les Bretons
perdent du foncier. D'un côté
on manque de repreneurs,
de l'autre on bataille contre
les résidences secondaires.
Deux cas de ﬁgure, deux cas
d'école. Au nord comme au
sud, le risque est « la mort
de la profession ». Au nord
comme au sud, les comités
régionaux montent au
créneau.

La transmission familiale (ici en Normandie) représente 80 % des reprises en Poitou-Charentes,
moins d'un quart en Bretagne sud.

Le CRC de Poitou-Charentes tambour battant

« Ce qui freine la reprise, c'est souvent le manque d'apport financier
des jeunes », relève Romain Peyraud,
du CRC Poitou-Charentes. Pour y
remédier, la Charente-Maritime offre
par exemple depuis le début de l'année une subvention de 10 000 euros
aux néo-conchyliculteurs. La région
a également mis en place un prêt à
taux zéro de 20 000 euros. Enfin, il y
a les aides du fonds européen pour
les affaires maritimes et la pêche, de
possibles emprunts bancaires...
Ce qui freine aussi la reprise, c'est le
manque de repreneurs. « On va aller
voir les jeunes pour leur présenter
les métiers de la conchyliculture »,

promet-on au CRC. Pôle emploi,
cabinets de reclassement, interventions dans les établissements
scolaires, présence sur les forums de
l'orientation, travail en partenariat
avec les organismes de formation et
de l'emploi : les pistes sont multiples.
« Aujourd'hui le métier n'attire pas
les gens mais c'est beaucoup par
méconnaissance, estime Romain
Peyraud. Ils ont le même problème
à la pêche. »
Pourtant, les atouts sont indéniables. Le taux d'échec à trois ans
des nouveaux installés en conchyliculture est d'à peine 8 %. Les raisons
sont souvent juridiques (divorce,

décès d'un des associés...), très
rarement économiques. À titre
de comparaison, dans le secteur
de l'artisanat et du commerce, ce
même taux à trois ans se situe entre
30 et 35 % pour les reprises et monte
à 51 % en cas de création !

Un outil d'évaluation
des entreprises

Arrêts d'activité (avant éventuelles reprises) en Poitou-Charentes
120

80
60
40
20
0

2007

2008 2009 2010 2011 2012

Cultures MARINES n°316 - mai 2018

2013 2014

2015

2016

Source : CRC PC

Nombre d'exploitations

100

« On va prendre notre bâton
de pèlerin », promet Romain
Peyraud, responsable des reprises
et créations d'entreprises au sein
du comité régional conchylicole
(CRC) de Poitou-Charentes. Car
certains chiffres donnent le vertige. Le bassin compte aujourd'hui
1 017 exploitations conchylicoles
contre 5 000 il y a 40 ans. Sans aller
chercher si loin, « on perd trente à
quarante établissements par an »,

En conchyliculture, ce qui freine
la reprise, c'est aussi, parfois, le prix
de vente. Divers outils vont être
mis en place pour mieux calculer
les prévisionnels financiers, ou la
valeur des entreprises par exemple.
« On projette de créer notre propre
outil d'évaluation des entreprises
dédié à la conchyliculture de façon
à avoir une valeur la plus juste
pour le cédant, et le repreneur »,
détaille encore Romain Peyraud.
Le CRC souhaite aussi recenser
de manière exhaustive toutes les
entreprises du bassin qui seront à
vendre dans les trois prochaines
années. « Les cédants potentiels
ont parfois peur de communiquer
sur la vente de leur établissement mais cela pourra se faire
de manière anonyme », prévient

Romain Peyraud. Aujourd'hui il n'y a
pas toujours de circuit établi pour la
reprise des entreprises, le CRC veut
« corriger le tir ». Les informations,
anonymes ou non, seront donc
présentées sur le site internet du
comité régional.
Enfin, le CRC de Poitou-Charentes
souhaite sensibiliser les cédants aux
mécanismes de la transmission :
donation-partage, location, cession
progressive de parts sociales... Il
faut rappeler que, dans ce bassin,
80 % des reprises se font dans le
cadre familial (contre moins d'un
quart en Bretagne sud). Des mécanismes d'allégement existent, un
seul maître mot dans le domaine :
« anticiper, martèle Jean-Michel
Aubin, ingénieur d'affaires au Crédit agricole. Si la transmission est
mal préparée, elle risque de ne
pas être conforme à vos souhaits,
de finir par une indivision qui se
passe mal. On a des dossiers qui
datent d'une vingtaine d'années
qui ne sont toujours pas bouclés.
Pire, vous risquez la disparition
de votre exploitation, ou son
fractionnement ». Un mauvais plan
pour le cédant, et pour la filière.
M. L.-L.

Table des matières de la publication Cultures marines n°316