Cultures Marines n°317 - 4

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Les huîtres de Hiroshima, parmi
Pays d'origine de
la Crassostrea gigas, le Japon
produit une fois et demi plus
d'huîtres creuses que
la France. Plongée dans leurs
techniques d'élevage avec un
ostréiculteur en mer de Seto,
au cœur de la principale zone
de production.

Jusqu'à 27°C
En cas de faibles pontes, comme
cette année, le producteur peut se
fournir chez des pêcheurs naisseurs
du département de Miyagi, au
nord-est de la même grande île de
Honshu. « Mon fournisseur n'élève
pas d'huître, précise-il. En hiver, il
récolte les algues. »
Au bout de huit mois, les fils
sont dédoublés. Il suffit d'installer
un séparateur en plastique plus
grand pour que les huîtres aient
plus d'espace pour se développer.
L'élevage se fait alors en immersion permanente sur des radeaux
en bambou. Chaque radeau fait
10 m de large sur 25 m de long et

Cultures MARINES n°317 - juin 2018

Mer de Seto

Hélène Scheffer

En ce début du mois de mai, le
temps est beau en face de l'île
Nasake-Jima, dans la mer intérieure
de Seto. À vingt minutes en bateau
du petit port de pêche de Kure,
au sud-ouest de l'île principale
de Honshu, Hiroaki Takada est
venu voir la pousse de ses huîtres
creuses. « Je fais le tour de chaque
radeau toutes les deux semaines
en moyenne, explique-t-il. Mais je
viens tous les jours relever les fils
quand c'est la période de vente. »
H iroak i Tak ada qui produit
« 8 millions d'huîtres par an »,
élève la magaki, ou Crassostrea
gigas, l'huître creuse la plus vendue
au Japon. Dans cette zone riche
de rivières aux eaux tempérées, il
capte les naissains sur des tubes ou
des collecteurs traditionnels : des
coquilles Saint-Jacques, enfilées
sur un fil de fer, espacées par des
petits séparateurs de plastique.
Les pontes se font en juillet, les
fils sont suspendus dans une zone
de nurserie en bordure de baie.
« Avec la marée, les naissains sont
immergés à peine quatre heures
par jour. Ils poussent très lentement jusqu'au printemps suivant.
En avril, on va les installer sur les
radeaux en pleine eau. »

Japon

Dans la mer intérieure de Seto, les radeaux d'élevage ostréicoles sont en bambou et doivent être changés tous les
sept ans.

accueille 170 fils, sur 10 mètres de
profondeur. Il faut compter près
de 18 mois pour atteindre la taille
commerciale. La température de
l'eau, qui oscille autour de 16 °C,
peut monter à 27 °C. « Les huîtres
peuvent tenir jusqu'à 30 °C, rappelle Hiroaki Takada. En seize ans
d'activité, je n'ai connu que des
mortalités normales, autour de
20 % des cheptels, et jamais de
moralités dues à la chaleur. Au
contraire. Quand j'ai commencé
ce métier au début des années
2000, on produisait une huître en
un an, parfois en 10 mois. Maintenant les eaux se sont refroidies,
et c'est plutôt en un an et demi. »
S'il n'est pas toujours victime
de tsunami comme en 2011, le
Japon subit de fortes tempêtes et
des typhons. L'année 2017 en a vu
passer 38 de différentes intensités.
« La baie est protégée, se félicite
Hiroaki Takada, il y a peu de casse.
Par précaution, on anticipe quand
même en déplaçant les radeaux
vers les zones les mieux abritées. »

À 40 ans, Hiroaki Takada est le
vice-président de la coopérative
de Kure, à une heure de route de
Hiroshima. « Je suis encore jeune,
le président est plus âgé que
moi », sourit-il. La coopérative de
pêche compte 80 membres, dont
15 ostréiculteurs. Outre les services
à la pêche, la coopérative rythme
aussi l'année des éleveurs. « C'est
elle qui me donne le droit de travailler avec le bateau. C'est aussi
elle qui fixe les dates de début de
récolte. »

Une gestion collective
Chaque conchyliculteur
exploite vingt radeaux, sur des
emplacements fixes (des concessions) attribués par tirage au sort.
La gestion de la baie est partagée
avec deux autres coopératives.
« Tous les membres de ma coopérative sont fermés en même
temps une semaine en août,
détaille le vice-président. Après la
période du captage de juillet, les

huîtres sont moins remplies et il y
a moins de travail. »
La coopérative est aussi l'interlocuteur de l'administration ou
des associations et ONG, pour
l'encadrement réglementaire ou les
questions environnementales. On
discute par exemple des travaux à
venir. Extensions, ponts, le Japon a
régulièrement des projets d'aménagement foncier sur l'eau. « Nous
avons touché des indemnisations
quand l'usine de papier a été
construite sur un îlot artificiel, ou
lorsque le pont a été érigé, perturbant les courants », pointe-t-il.
Une fois débarquées, les huîtres
sont mises en bassin et décoquillées le lendemain par les dix ouvriers
que compte l'entreprise. Passées à la
calibreuse, elles sont vendues par
tailles : S, M, L, XL. Takada Suisan,
son entreprise d'aquaculture, vend
la majorité de sa production au
même grossiste, seul nom connu
des consommateurs. « Je vends
moins cher mais je n'ai plus la responsabilité sanitaire du produit,

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