Produits de la mer - n°173 - juin 2017 - 51

Dossier ❘ CRUSTACÉS
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tions, la filière du tourteau cherche à évoluer. La ressource est relativement faible
face à l'effort de pêche et à la demande du
marché, et il convient d'affirmer les mesures
de gestion, à l'image des grands producteurs irlandais, ces pionniers dans la transformation qui entendent bien rester des
acteurs compétitifs. L'innovation apparaît
nécessaire, même si celle-ci n'est pas toujours l'eldorado envisagé. « Nous avons pris
le train du prêt à consommer il y a quelques
années, reprend Erwan Dussaud, avec la
cuisson à l'eau de mer, pour les plateaux et
autres dérivés (entier, décortiqué, pinces...).
Nous pensions que, vu les stratégies marketing des grandes surfaces et les évolutions
des modes de consommation, cela marcherait bien, voire que les jours du crabe vivant
étaient comptés. Mais non. Le marché du cuit
est aujourd'hui mature. Il connaît une croissance régulière, mais au même titre que le
vivant, qui conserve sa place sur les étals.
Enfin, auprès des restaurateurs et des grossistes... les deux marchés coexistent. »
En France, la restauration avale à peine
10 % des volumes de tourteaux mis en marché. La bête reste difficile à mettre en œuvre
même si, avec l'offre de sachets de crabe
décortiqué, garnir des plats devient plus
aisé. Ce type de transformation est généralement réalisé au Royaume-Uni, selon des
cahiers des charges précis.
Reste que certains groupes de restauration envisagent de miser un peu plus sur
le tourteau, certains souhaitent voir émerger des identifications d'origine précise. Un
label ou un visuel original pourrait devenir
une piste de différenciation, de valorisation.
Pour l'instant, la clientèle doit se contenter
de mentions type « débarqué en Bretagne »
et bien malin le consommateur susceptible
de reconnaître la nationalité d'un tourteau.
Si l'espèce est la même, que les zones
de pêche sont voisines, il n'empêche qu'en
Bretagne ou en Irlande par exemple, les
acteurs ne font pas les mêmes choix. Dans
la zone de pêche La Chapelle, les Bretons
apprécient les tailles importantes qui font
merveille à l'étal. Les Irlandais misent parfois
sur des captures de spécimens plus petits
destinés à la cuisson et au décorticage.
C'est d'ailleurs en cuit que le crustacé
s'apprécie sur internet. « Les ventes se développent encore, détaille Pierre-Yves Bizien.
Sur poissonnier.com, le tourteau est un des
best-sellers, avec un taux de réachat très
important. » Notez que l'opérateur propose sur ce site un prix de vente unitaire
et non au kilo. ■

Zoom sur le

homard bleu

ébarqué en Bretagne, le homard bleu
se valorise mieux que celui d'Irlande
ou d'Écosse, pourtant tout aussi
européen ! Erwan Dussaud, responsable
commercial chez Béganton à Roscoff, glisse
d'ailleurs avec malice que « tout le monde
a envie de dire que le bleu, c'est le breton ».
Mais il rappelle qu'en matière d'indication,
la seule mention possible est « débarqué
ou en provenance de Bretagne ». « Sachant
qu'il est possible d'individualiser les captures
selon les navires pour nos clients, notamment
en basse saison. En haute saison, cela s'avère
plus complexe tant il y a de homards dans les
bassins. » Pour répondre aux demandes, les
Homarus gammarus arrivent de partenaires
français, irlandais ou écossais.
En 2016, les volumes déclarés sous criées
ont globalement progressé de 3 %. Les
apports considérables pendant les fêtes ont
freiné la hausse des cours à cette période. À
comparer avec Noël 2015, les prix de Rungis
baissaient même de 11 % selon le Réseau
des nouvelles des marchés.
Courant mai 2017, Béganton évoquait
des cours de 20 à 22 €/kg aux producteurs.
Mais alors que « 90 % de la production est au
Royaume-Uni », comme le rappelle Hervé
Roche, responsable du département crustacés chez Reynaud Côte d'Azur, le « breton » est plus onéreux à acquérir. « Au
Royaume-Uni, on peut acheter directement
aux producteurs, poursuit Hervé Roche.
En Bretagne, les pêcheurs sont souvent déjà
liés à des mareyeurs qui font leurs marges. »

De quoi expliquer les différences, parfois
de plusieurs euros, entre les différentes
origines, notamment en début de saison.
« En mai, j'en trouvais d'outre-Manche à
23,50 €/kg, contre 27-28 €/kg en France. »
Après, il faut compter avec les coûts de
transport, via Boulogne, mais « le homard
tient bien en sec », poursuit le responsable
qui envisage « une baisse des cours en juin,
au moment de la plus forte saison ». Sans
les homards bleus du Royaume-Uni, rares
seraient les opérations promotionnelles à
40 €/kg ou 15 € la pièce de 500 grammes !
Pierre-Yves Bizien, le directeur général
de Global Seafood, estime pour sa part que
le marché du homard européen est assez
stable. Si les prix grimpent « à la faveur d'une
ouverture vers l'export, il demeure compétitif
sur le marché national face à un Homarus
americanus - canadien ou américain - dont
les prix sont tirés par la demande asiatique. »
Pour le responsable, par ailleurs cofondateur de Global Seafood Ldt, au Canada, qui
traite 2 500 tonnes de homards canadiens
par an, « le homard européen est moins connu
en Asie. Le voyage semble lui faire perdre un
peu de sa noblesse ». Alors, pour en développer l'export, Global Seafood mise sur la
modernisation de ses viviers. « D'ici juillet,
nous allons passer à un système à l'américaine, avec des caisses flottantes de 50 kg. »
Une façon selon lui de réduire la mortalité
et de conserver, même en haute saison, la
traçabilité au bateau, en évitant de mélanger des lots.

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