produit de la mer - n°180 - Mars 2018 - 23

Actu ❘ FOCUS LA RÉUNION

La truite d'Hell-Bourg,
référence de l'aquaculture réunionnaise
Dans les hauts de
La Réunion, Hell-Bourg
héberge la plus ancienne
des fermes aquacoles de
l'île, reprise voilà quatre
ans. Roland et Véronique
Élisabeth souhaiteraient
élargir le public de leurs
truites. Pourquoi pas grâce
au label Produit Péi.

▼

réée il y a trente ans, la Ferme
d'Hell-Bourg s'étale sur 8 000 m2.
Sur le terrain incliné, 25 bassins
alignés dans un jeu de cascades
accueillent des truites arc-en-ciel à divers
degrés de développement. « Nous produisons 8 à 10 tonnes de truites portion de
200 à 300 grammes par an », chiffre Roland
Élisabeth, cogérant du site.
Le cycle de croissance des poissons oscille
entre 18 mois et deux ans, en fonction des
tailles demandées par les clients, restaurateurs, grossistes ou particuliers mais aussi

En visite à Hell-bourg,
le représentant de l'Apar,
Yann Robert, en profite pour
capturer son dîner du soir.

Roland Élisabeth, cogérant de ce site des hauts de l'île.

selon les pluies. « Nous fonctionnons en circuit ouvert. L'eau qui s'écoule en continu
et en cascade, pour oxygéner les bassins,
vient d'une source naturelle. S'il ne pleut
pas assez, cela peut gêner la croissance
des truites, explique-t-il. L'eau des bassins a
alors tendance à dépasser les 12 °C, la température idéale pour ce poisson. »

t
la production de
truites arc-en-ciel à
La Réunion, dont 10
sont produites par
la ferme d'Hell-Bourg.

Une production piscicole restreinte

Avec la fermeture des fermes d'ombrines, la production
piscicole de La Réunion se limite à 25 tonnes de truites et
80 tonnes de tilapias gris et rouges, élevés dans la bande
littorale. Une zone où le prix du foncier limite l'extension
des activités. Yann Robert, représentant de l'Association
des professionnels de l'aquaculture de La Réunion (Apar)
et gérant de la société aquacole du Koloss, basée à SaintAndré, travaille, lui, les tilapias dans un élevage en circuit
semi-fermé. « Nous essayons de conserver les tilapias deux ans
pour les vendre lorsqu'ils sont à un poids de 1,2 kg, prisé des
restaurateurs. Ma production est de 10 tonnes. Et je ne suis
pas sûr de vouloir faire beaucoup plus : avec les risques de
cyclones, nous pouvons tout perdre très vite. »
Pas sûr que ce frein au développement de la production
aquacole puisse être levé facilement. Mais il en est d'autres
qui le seront peut-être : comme d'autoriser l'élevage d'autres
espèces. « Pourquoi pas la carpe et l'anguille de La Réunion »,
espère Roland Élisabeth, de la ferme d'Hell-Bourg.

Le couple Élisabeth accueille donc avec
bienveillance les averses fréquentes dans
les hauts de l'île, même si le nettoyage
des bassins qui s'impose après de fortes
pluies génère un surcroît de travail. « Nous
avons pensé à travailler en circuit fermé et
à nous lancer dans l'aquaponie mais le coût
des pompes pour remonter l'eau serait trop
lourd pour notre installation », poursuit le
responsable.
La ferme d'Hell-Bourg s'approvisionne
en œufs de truite auprès d'Aqualande.
Ils seront mis à incuber et éclore dans un
bâtiment fermé, « à l'abri de la prédation
des chats sauvages ». Les alevins resteront
à l'abri deux à trois mois avant de basculer dans les bassins extérieurs. « Mais
cela n'empêche pas les mortalités »,
indique un peu fataliste Roland Élisabeth.
Si les œufs viennent de métropole, l'aliment, qui compte pour 35 % du coût de
revient de la truite, est produit localement
par Nutrima.
Actuellement, les 10 tonnes produites
par la ferme sont vendues à 70 % en direct
aux Réunionnais. Pour les clients, c'est l'occasion d'une partie de pêche fort ludique.
Les restaurateurs du coin et le grossiste
Evamer acquièrent le reste. À ce dernier
d'assurer la diffusion du produit auprès des
poissonniers. « Pour des questions logistiques, il est difficile d'aller livrer en direct
les poissonneries du littoral. » De fait, entre
les embouteillages et les routes sinueuses,
on peut dire que déguster une truite d'HellBourg est un plaisir qui se mérite.
Pour tenter de rendre cette production locale plus accessible sur l'île, Ludovic
Courtois, délégué général de l'Aripa, travaille avec l'association des aquaculteurs
réunionnais à monter un dossier pour
obtenir le label Produit Péi. Ce label, qui
revendique le côté local de la production,
est prisé des Réunionnais. L'obtenir pourrait participer à l'élargissement du marché. « Or, nous pourrions facilement doubler notre production », précise Roland
Élisabeth. « Mais au-delà du label Produit
Péi, il faut promouvoir la truite localement
en s'appuyant sur l'authenticité des modes
de production, en développant des ateliers
culinaires », évoque Ludovic Courtois. ■

PRODUITS DE LA MER N°180 MARS 2018

❘ 23 ❘

Table des matières de la publication produit de la mer - n°180 - Mars 2018