HSYachts2016Feuilleteur - 4

2 Vendredi 2 septembre 2016 Hors-série le marin Contexte international marché Un engouement qui ne se dément pas I L'industrie du yachting, qui a décollé au début des années 2000, se montre particulièrement résiliente aux crises financières ou géopolitiques. Avec des hauts et des bas, les commandes de yachts restent à un haut niveau qui profite d'abord à l'Europe. Autour de 700 navires si l'on démarre à 24 mètres, 500 pour les plus de 30 mètres de longueur. Bon an mal an, le carnet de commandes des yachts tel qu'on l'observe à chaque début d'année reste sensiblement le même depuis 6 ans. Seul le nombre de chantiers actifs sur ce marché très exigeant à la fois en termes de compétences techniques et de trésorerie a tendance à se réduire au fil des ans. C'est le cas en Italie comme en Allemagne, en France ou encore aux États-Unis, où Trinity Yachts a baissé les bras et Palmer Johnson a choisi de relocaliser toute sa production aux Pays-Bas. Prestigieuse et lucrative - encore que les chantiers n'en accaparent pas forcément la plus grosse part -, la construction de yachts est une activité à risque où la confiance finit toujours à revenir à celui qui a le plus d'expérience. À ce petit jeu, les Européens sont les grands gagnants et les Américains les grands perdants. La part des yachts made in Europe atteint désormais 78 % des navires en flotte. Seuls Taïwan, avec de nombreux chantiers travaillant en réalité pour des donneurs d'ordre américains, ou encore les Émirats arabes unis, où Gulfcraft a réussi son implantation sur un marché des gammes rapides pourtant très encombré, arrivent encore à survivre à l'hégémonie européenne. Installé dans l'État de Washington, sur la côte ouest des États-Unis, Christiensen l'avoue : sans le Jones Act, socle juridique du protectionnisme américain en matière maritime, le constructeur serait incapable de rivaliser avec ses concurrents européens. Davantage De proprIétaIres Si l'industrie de la croisière est portée par l'accroissement démographique des classes moyennes dans le monde et une offre de paquebots de plus en plus sophistiqués, celle des yachts obéit aux mêmes principes. Mais sur une toute autre échelle de revenus. Évolution du carnet de commandes de yachts par tailles 900 800 700 600 500 400 300 47 97 222 100 226 232 200 236 248 256 257 2010 2011 2012 2013 2014 2015 > 70 m 50-70 m Et sur ce point, l'industrie peut être rassurée. Le socle des très riches capables de s'offrir un yacht dont la valeur moyenne est estimée à 10 millions de dollars se porte bien et continue d'augmenter. Dans son étude annuelle sur le yachting et les Ultra High Net Worth - cette élite mondiale dont la fortune personnelle démarre à 30 millions de dollars -, le cabinet Camper Nicholsons, associé aux consultants de Wealth X, 1 1970-1980 100 m 8 3 4 1980-1990 1990-2000 9 2000-2010 2010-2016 70 m et <100 m Au cours des trois prochaines années, cette flotte doit encore s'agrandir d'au moins 56 nouvelles unités, dont 11 navires de plus de 100 mètres. Surtout, la part de ces très grandes tailles dans le carnet de commandes global des yachts de plus de 30 mètres ne cesse de grandir. Elle atteint aujourd'hui 13 % du total des unités en commande. gros besoIns en refIt Encore plus qu'aujourd'hui, les besoins d'équipements pour l'entretien de ces mégayachts vont se faire sentir. Les chantiers constructeurs de ces très grandes tailles sont les premiers à offrir leurs services pour le refit. C'est notamment le cas de Lürssen et de Blohm + Voss, en Allemagne, ou de Penndenis, au Royaume-Uni, qui d'ailleurs 40-50 m 30-40 m 24-30 m a comptabilisé 211 955 de ces multimillionnaires en 2015, parmi lesquels 2 405 sont en fait milliardaires. C'est 680 de plus qu'en 2014, avec 80 milliardaires supplémentaires, pour une fortune totale estimée à 29 800 milliards de dollars. Voilà largement de quoi s'offrir un yacht, un superyacht et même un megayacht. Marge De progressIon Ces ultra-riches, répartis à plus de 90 % entre l'Amérique du Nord (75 195 individus pour 10 300 milliards), l'Europe (61 095 pour 8 200 milliards) et l'Asie (47 550 pour 7 200 milliards), constituent la cible des chantiers et de la galaxie des brokers et des designers qui cherchent à les persuader que la possession d'un yacht reste bien une valeur sûre du très grand luxe. La marge de progression reste importante. 21 4 135 0 36 <1970 142 219 30 0 139 201 54 83 200 40 7 134 212 49 8 146 220 50 10 70 76 228 Mégayachts par périodes de construction 16 66 75 231 60 20 67 84 148 l'ascension fulgurante des mégayachts Pour mesurer la différence entre un riche et un très riche propriétaire, rien ne vaut la taille de son navire. Et dans ce domaine, les écarts sont énormes. Alors que la crise financière de 2008 a sérieusement touché les segments des 24 à 30 mètres, voire les 30 à 40 mètres, la classe supérieure des mégayachts ne s'est jamais aussi bien portée. On recense à ce jour 166 de ces yachts supérieurs à 70 mètres, dont 42 supérieurs à 100 mètres. Cela ne représente que 3 % de la flotte des yachts de plus 30 mètres actuellement en service, mais c'est bien l'un des segments les plus dynamiques dans le secteur de la construction et de la réparation navale, et assurément le plus lucratif. L'engouement pour ces très grandes tailles est relativement récent : 70 % de cette flotte a été construite à partir de 2000, et 40 % depuis 2010. Entre 2010 et 2016, les chantiers ont livré deux fois plus de mégayachts qu'en 30 ans, entre 1970 et 2000. Si l'on regarde ces grandes tailles dans le détail, neuf mégayachts de plus de 100 mètres ont été livrés entre 2000 et 2010, et déjà 21 entre 2010 et 2016. Juste en dessous, dans le créneau des plus de 70 mètres mais inférieurs à 100 mètres, on constate la même tendance : 36 livraisons entre 2000 et 2010, 49 depuis 2010. 54 87 49 81 138 ne fait plus que du refit. Mais les besoins sont tels que de nouveaux chantiers d'entretien veulent investir le créneau, notamment en Méditerranée. Alors qu'Amico, à Gênes, cherche déjà à s'agrandir après avoir accueilli cette année le Queen Miri (91,50 mètres), que le napolitain Palumbo étend désormais sa toile de chantiers de réparation jusqu'aux Canaries, tous les yeux se tournent à présent vers la grande forme de l'ancien chantier naval de La Ciotat. Concédée à l'Allemand Blohm + Voss au grand dam de Composite Works, qui jouissait depuis 18 ans du site, la forme modernisée va disposer d'un portique de 660 tonnes et d'une forme de 200 mètres de long extensible jusqu'à 335 mètres. F. A. 2016 Source : Boat international/Market intelligence Autant la possession d'un yacht va de soi pour un Américain fortuné, autant son équivalent allemand ou chinois se fait encore prier. Les Américains demeurent les premiers propriétaires investisseurs : 33 % des plus grosses fortunes au monde sont américaines et 33 % des propriétaires de yachts sont américains. Le goût pour les yachts est encore plus fort chez les Britanniques et les Italiens, qui représentent respectivement 11 et 5 % de la flotte, alors qu'ils ne pèsent que 5 % des plus grosses fortunes mondiales dans le cas des Britanniques, et un petit peu moins pour les Italiens. À l'inverse, les Allemands (9 % des plus grosses fortunes familiales) et les Chinois (5 %) n'apparaissent pas dans le classement des propriétaires. C'est sur ce terreau économique mais aussi culturel que se joue le sort de cette jeune industrie qui ne demande qu'à grandir. Frédérick AUVRAY les règles de Classe inContoUrnables R elativement récent, le recours à une société de classification est devenu la norme dans l'industrie des yachts. Seules les unités les plus petites et utilisées à titre strictement privé y échappent encore, ce qui en nombre d'unités représente toujours une part importante de la flotte. Pour les autres, et a fortiori les yachts exploités commercialement, la société de classification apporte deux types de services aujourd'hui incontournables. Primo, avec les règles de classe, le propriétaire s'assure que son navire a été construit dans les règles de l'art, saufconduit décisif pour les assurances. Secondo, ces sociétés privées sont habilités par l'État du pavillon pour certifier que le yacht applique les différentes réglementations internationales concernant la sécurité (Solas), la prévention de la pollution (Marpol), la gestion de la sécu- rité (ISM) et de la sûreté (ISPS), et plus récemment les conditions de travail (MLC 2006). Les degrés d'obligations varient selon la taille des yachts, avec des seuils de 300, 400 et 500 tonneaux de jauge brute. Dans ce marché de la classification, le Lloyd's Register arrive largement en tête avec 777 navires existants et en construction pour un total de 83 740 tonneaux. Suivent dans ce classement, arrêté en mars 2016 par IHS Faiplay : la société américaine ABS (372 navires et 18 709 tonneaux), DNVGL (83 navires et 12 759 tonneaux), le Rina italien (249 navires et 11 641 tonneaux) et le français Bureau Veritas (124 navires et 5 540 tonneaux). À eux cinq, ils couvrent 70 % de la flotte potentiellement classable en nombre de navires et 86 % du tonnage. F. A.

Table des matières de la publication HSYachts2016Feuilleteur