Doctorat & Notariat - Tome 60 - La fiducie : aspects juridiques et fiscaux - 64

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LA FIDUCIE : ASPECTS JURIDIQUES ET FISCAUX

de 2009 sur l'accès au crédit des PME159 visant à adapter la fiducie pour permettre l'essor de la finance islamique en France.
b) Le débat relancé sur l'introduction de la « propriété fiduciaire »
sous la pression de la finance islamique
107. L'essor de la finance islamique relance le débat sur la « propriété fiduciaire ». En effet, le législateur a souhaité faire d'une pierre deux coups en réformant le régime juridique de la fiducie : d'une part, adapter la fiducie afin de doter
le droit français d'une structure capable d'émettre des instruments financiers respectant les prescriptions de la charia ; et, d'autre part, trancher la délicate question de la nature de la propriété fiduciaire. Toutefois le Conseil constitutionnel, en
censurant les dispositions de la loi, a porté un coup fatal à la réforme du régime
juridique de la fiducie. Après avoir présenté les enjeux de la finance islamique (i),
seront exposés les principes de la réforme (ii) et les motifs de la censure de cette loi
par le Conseil constitutionnel (iii).
i. Les enjeux de la finance islamique
108. La finance islamique160 a pour objet de développer des services bancaires et
financiers compatibles avec les prescriptions de la charia. Elle a connu un essor considérable ces dernières années161. Cinq principes de l'islam doivent être respectés et avalisés par un conseil de conformité à la charia, afin que le caractère islamique d'un
produit financier ou d'une transaction soit retenu. La finance islamique commande,
tout d'abord, le respect de trois grandes prohibitions : de la rémunération en fonction
du seul écoulement du temps, soit de l'intérêt ou riba ; de la spéculation ou de l'incertitude, soit corrélativement du garhar et du maysir ; enfin, du financement des secteurs
tenus pour illicites tels que les jeux de hasard, l'alcool, la pornographie ou l'armement, soit du haram. Ensuite, elle pose deux obligations : de partage des profits et des
pertes ainsi que l'adossement de tout financement à un actif tangible162.
109. Certains auteurs voient dans la finance islamique un moyen de rationnaliser la finance conventionnelle163. Pour reprendre l'analyse de Gilles Saint-Marc : il
159. Proposition de loi n°  1227 tendant à favoriser l'accès au crédit des petites et moyennes
entreprises et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers, article 6 sexies B : « Le fiduciaire
exerce la propriété fiduciaire des actifs figurant dans le patrimoine fiduciaire, au profit du ou des
bénéficiaires selon les stipulations du contrat de fiducie ».
160. P. Marini, Rapport Sénat, n° 442, p. 78 : Elle apparaît dans les années 1970, dans les pays
de tradition musulmane, même si elle reste aujourd'hui très concentrée dans le Golfe persique et en
Asie du Sud-est, elle s'exporte aux États-Unis et en Europe suite à la très forte augmentation du prix
du pétrole ces dernières années. L'afflux vers les grandes places financières mondiales de l'excès de
liquidités en provenance des monarchies du golfe a suscité un intérêt croissant pour ce système
économique basé sur le Coran et la Sûnna.
161. En quelques chiffres : Pour l'année 2009, l'agence de notation Moody's estime le montant
de l'épargne investie de manière Shariah compliant à 840 milliards de dollars sur un montant total
d'épargne disponible au Moyen-Orient et en Asie du Sud-est de plus de 6 000 milliards de dollars. En
outre, elle enregistre une forte progression avec un taux de croissance qui varie entre 10 % et 15 % par
an ces dernières années.
162. J.  Arthuis, La finance islamique en France : quelles perspectives ? ; v.  égal. : J.  Arthuis,
Rapport Sénat, n°  329, rapport d'information fait au nom de la commission des Finances sur la
finance islamique, 14  mai 2008, p.  15 ; P.  Marini, Rapport Sénat, n°  442, p.  78. ; P.  Dupichot,
« Fiducie et finance islamique », D. 2010. 1064.
163. P.  Marini, Rapport Sénat, n°  442, p.  79 ; G.  Saint-Marc, « La finance islamique, une
alternative pour financer l'économie française », Bull. Joly Sociétés, 1er avril 2009, n° 1, p. 153-157 ; du
même auteur, « Finance islamique : un exemple de finance responsable et participative » - consultable
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