Guide pratique - L'honoraire de l'avocat - 1re - 126

L'HONORAIRE DE L'AVOCAT

il s'est fondé sur l'équité sans se référer aux critères légaux retenus par l'article 10
de la loi du 31 décembre 1971.
114 › Le juge de l'honoraire n'est pas celui de la responsabilité professionnelle. -
Le juge de l'honoraire ne saurait devenir le juge de la responsabilité. Par suite le
juge de l'honoraire ne peut statuer sur une demande incidente tendant à la compensation de la somme due à l'avocat avec une créance indemnitaire réparant un préjudice prétendument souffert par le client du fait d'un retard dont l'avocat serait
responsable ou sur une demande de dommages-intérêts formée par l'avocat contre
son client au titre du préjudice résultant du comportement de celui-ci et du retard
apporté au règlement des honoraires.
En pratique, il doit être veillé à ce que le juge de l'honoraire ne devienne pas le juge
de la responsabilité, sourde tentation s'il en est pour le juge du fond30. Un arrêt de
la haute cour avait paru remettre en cause cette règle en cassant, au visa de l'article 1147 (devenu 1231-1) du Code civil, la décision d'un premier président qui avait
fixé le montant des honoraires sans prendre en considération « le manquement à
l'obligation d'information préalable du client ». Mais il s'agit d'une décision isolée31.
La régularité des décisions actuelles des juges du fond ne fait pas oublier que des
écarts sont perçus, même devant la Cour de cassation. Ainsi un premier président a
été approuvé par elle alors que, pour fixer les honoraires et en ordonner une restitution partielle, il relevait entre autres remarques que l'avocat ne justifiait pas avoir
instruit le dossier en sollicitant les autres documents nécessaires au soutien de la
demande, soit auprès de son client, soit auprès du notaire, que les assignations
préparées ne comportaient pas une argumentation juridique détaillée, que par
ailleurs le délai mis par l'avocat pour introduire la procédure avait été excessivement long, alors qu'il n'avait pas mis ce temps à profit pour rassembler les éléments de preuves. La haute cour reliait ces motifs au nombre et à la nature des
diligences accomplies par l'avocat, ainsi qu'au délai d'exécution du mandat32.
Mais revenons à la jurisprudence presque constante et conforme à l'esprit et à la
lettre du texte. La Cour de cassation a fait sienne la formule suivante : « Le premier
président, saisi d'une procédure de contestation d'honoraires, n'est pas compétent
pour statuer sur une action en responsabilité pour faute professionnelle ». La jurisprudence des juges du fond est généralement conforme à ce principe mais parfois la
Cour de cassation doit le rappeler. À cet égard, le premier président ne dispose pas
d'une compétence élargie par rapport à celle du bâtonnier, ce que résume parfaitement le chef de la cour de Bordeaux : « Le problème de la responsabilité professionnelle d'un avocat relève de la compétence du tribunal de grande instance, et non de
celle du bâtonnier de l'ordre, saisi en application des articles 174 et suivants du
décret du 27 novembre 1991 et en appel de la nôtre. Si l'appelant estime en conséquence que son avocat a commis des fautes professionnelles et que celles-ci lui ont
causé un dommage moral ou matériel dont il lui doit réparation, il doit saisir, par voie
d'assignation, le tribunal de grande instance et faire statuer cette juridiction à cet
égard ». Le juge du fond est souvent amené à le rappeler, par exemple en soulignant
30. CA Bourges, 6 déc. 2016, nº 16/01022, Gaz. Pal., 6 juin 2017, note D. LANDRY.
31. Cass. 1re civ., 18 juill. 2000, nº 97-14713, Bull. civ. I, nº 214.
32. Cass. 2e civ., 13 janv. 2012, nº 10-27818.

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