Guide pratique - L'honoraire de l'avocat - 1re - 18

L'HONORAIRE DE L'AVOCAT

consommateur »35. Ainsi est-il grand temps de prendre en compte la norme
européenne dans nos relations avec nos clients, et notamment de mettre en
œuvre la négociation et la conclusion de conventions d'honoraire, autant que
possible, sauf cas d'urgence, de telle façon que chacun soit informé et s'engage
en connaissance de cause, et ce dans toutes les matières ou domaines d'activité
qui sont les nôtres, même ceux où un tel écrit n'est pas obligatoire. La directive
nº 2006/123/CE du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur considère l'avocat, à la différence des notaires ou des huissiers de justice
par exemple, comme un prestataire fournissant un service, ce qui implique la
mise en jeu du droit de la consommation à l'égard de ses clients consommateurs. Cet élément est parfois opportunément rappelé par le juge de
l'honoraire36. C'était notre raisonnement avant l'intervention de la loi du 6 août
2015. L'écoulement du temps transforme cette position volontaire en songe fait
réalité. Ce n'est pas le poète qui accomplit ce prodige mais tout simplement le
législateur. Et surtout, en lisant cette décision, ne nous trompons pas. Ne considérons pas l'Europe comme mère de tous nos maux. De la même façon que
nous estimons comme une bénédiction l'obligation tirée de la nouvelle norme
de contractualiser par écrit la question des honoraires, comme gage de sécurité
juridique, voyons l'Union européenne comme un aiguillon salvateur. Chérissonsla comme le plus beau projet de notre époque et manions-la à bon escient pour
améliorer le sort de nos vieux et beaux pays en général, et de nos fiers barreaux
en particulier. Il nous appartient d'écarter les nouveaux populismes qui voudraient la briser. Agissons efficacement en son sein pour construire ensemble
l'Europe unie rêvée : éclairée, solidaire et équilibrée, humaniste, multiculturelle
et rayonnante. Juridique mais aussi politique37.
12 › Hommage à Montesquieu, Il faut éclairer l'histoire par les lois, et les lois par
l'histoire. - Lorsque Charles-Louis de Secondat, baron de La Brède et de
Montesquieu38 (1689-1755), étudie la théorie des lois féodales chez les Francs,
dans le rapport qu'elles ont avec les révolutions de leurs monarchies, il analyse
avec précision les faits historiques et la norme juridique et leur interaction réciproque pour accomplir la démonstration de ce que le père d'une constitution serait
tel monarque plutôt que tel autre. C'est ce raisonnement logique qui lui inspire
l'une de ses plus célèbres sentences tirées de De l'esprit des lois : « Il faut éclairer
l'histoire par les lois, et les lois par l'histoire »39. Le sujet que nous traitons ici participe depuis la nuit des temps de l'aura des avocats et des barreaux. C'est pourquoi
il nous semble utile de replacer le droit et la tradition de l'honoraire dans leur
contexte historique de façon à libérer l'avocat de faux-semblants doctrinaires à la
fois surannés et spécieux, carcans inutiles et injustifiables, tout en l'engageant à
respecter l'éthique consubstantielle à l'exercice de sa profession.
35. CJUE, 9e ch., 15 janv. 2015, aff. C-537/13, InfoCuria, Gaz. Pal., 11-12 déc. 2015, p. 11, note J.-L. GAINETON.
36. CA Nîmes, 10 déc. 2015, nº 15/04409.
37. I. J.-L. GAINETON, « Europe, Eros et Démos », Rev. SIHPA, nº 12, 2016 ; II. A. ARJAKOVSKY (dir.), Histoire de la conscience européenne, Salvator, 2016.
38. La plupart des juristes que nous citons tout au long de notre ouvrage sont étudiés dans un livre publié avec le
soutien de la mission de recherche Droit et Justice et auquel nous nous référons souvent : P. ARABEYRE, J.-L. HALPERIN,
J. KRYNEN (dir.), Dictionnaire historique des juristes français, PUF, 2007.
39. MONTESQUIEU, De l'esprit des lois (1748), Gallimard, 2007, deux vol., t. II, livre XXXI, chapitre II.

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