Guide pratique - L'honoraire de l'avocat - 1re - 72

L'HONORAIRE DE L'AVOCAT

en adéquation de la jurisprudence à cet égard. D'ailleurs il ne s'agit en fait pour
la haute cour que de sortir d'un bref moment d'égarement. Remémorons-nous la
jurisprudence classique dont rien ne justifie qu'elle ne soit pas toujours appliquée
par le juge de l'honoraire.
La haute cour, par exemple, avait été conduite à rappeler dans des termes totalement dépourvus d'équivoque que « sauf si elle est affectée d'une cause de nullité
dont il appartient à celui qui l'invoque de rapporter la preuve, la convention d'honoraire soumise par l'avocat à son client et acceptée par celui-ci fait la loi des parties ;
(...) cette convention ne peut qu'être appliquée sans qu'il soit nécessaire de l'interpréter dès lors que ses clauses ne présentent aucune ambiguïté quant à l'intention
des parties et à la clarté de leurs engagements réciproques »31.
51 › Moment d'égarement aux conséquences désastreuses. - La Cour de cassation, par arrêts prononcés le 17 octobre 1995 et le 3 mars 1998, a paru rompre
avec cette jurisprudence pourtant ancienne, pérenne et de surcroît conforme au
droit des obligations. Il s'en est suivi une confusion générale confrontant les
barreaux à une contradiction délétère au moment où ils s'engageaient fermement dans une évolution visant à la contractualisation toujours plus forte des
rapports des avocats avec les clients. Il est peut-être dommage qu'une telle
importance ait été accordée à ces décisions alors que dans le système juridique
français la place de la jurisprudence n'est pas celle qui lui est dédiée dans des
pays tels que les États-Unis d'Amérique et qu'en France le temps des arrêts de
règlement est révolu. Les magistrats français ont l'habitude de résister aux
erreurs commises par la haute cour. Cela arrive quelquefois dans une même
espèce sur renvoi de cassation. C'est très fréquent dans des instances sans
lien direct avec celle jugée dans des conditions contestables par la Cour de cassation mais aux objets ou circonstances similaires. Nous devons à la vérité que
le barreau lui-même n'est certes pas étranger à la prise en compte excessive et
inappropriée de la voie tracée dans ces décisions par la cour suprême. Peut-être
trop vite, et trop servilement, beaucoup d'institutions ordinales, dont rappelonsle le juge du premier degré de l'honoraire est le chef, mais aussi des déontologues ou des docteurs prirent-ils ce revirement comme incontournable sans
prendre la peine de rechercher ce qui avait pu le produire par une fausse application des textes. Errare humanum est. La justice est humaine à tous les niveaux,
même à celui le plus élevé. Il est toujours temps de corriger une méprise. Mais
qu'en est-il de ces décisions ?
L'arrêt de 1995 fut prononcé suite à un litige international en matière de droit de
l'environnement après la perte d'un navire pétrolier. Il s'agissait d'interpréter une
convention d'honoraire prévoyant pour les avocats français un « calcul conformément aux règles en vigueur à l'ordre des avocats à la cour d'appel de Paris » et ne
visant pas expressément l'honoraire de résultat. Après une issue exceptionnellement positive de la procédure, l'avocat voulut facturer des honoraires de résultat
en se basant sur la convention d'honoraire. La Cour de cassation a répondu, au
seul visa de l'article 1134 (devenu 1103) du Code civil, « qu'en l'absence de toute
31. Cass. 1re civ., 22 nov. 1994, nº 93-10150.

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