Guide pratique - L'honoraire de l'avocat - 1re - 9

INTRODUCTION
1 › Poésie versus Trivialité. - Pour l'avocat, la question de son honoraire apparaît fort triviale car, pour qu'il demeure un honneur, il convient de ne pas s'en
inquiéter. La matière est ardue, sèche et dépourvue de noblesse. Rares sont
donc les études qui le concernent. Mais des ouvrages déontologiques fondamentaux, qu'ils soient généraux1 ou plus spécialisés2, présentent des développements parfois nourris sur ce thème. Pour la première fois il nous a été proposé
de le traiter lors de la dernière édition de l'ouvrage Droit et déontologie de la
profession d'avocat3. Déjà, nous avions hésité à accepter la tâche. Le défi de
l'écriture d'un ouvrage exclusivement consacré au sujet nous a ensuite été
lancé. L'utilité pratique de la mission nous a paru devoir atténuer les premières
appréhensions, ce d'autant que ce pouvait être aussi l'occasion de nous remémorer les évocations plus légères et élevées des anciens poètes.
Peut-être la vilaine vulgarité du sujet n'est-elle qu'apparente et la gageure toute
relative. Preuve en serait la poésie des clercs de la basoche4 de la fin du Moyen
Âge et de la Renaissance. À tout le moins, la poésie pourrait exorciser la basse
préoccupation pécuniaire. C'est ainsi que nous donnons en exergue de notre ouvrage
une citation littéraire extraite d'une œuvre si célèbre qu'il serait presque inutile de la
présenter puisqu'il s'agit de la Farce de Maître Pathelin. Au cours des siècles son
texte a été remanié, modernisé, augmenté. Mais le vers « Et que nous vaut votre
science ? » est déjà présent dans la version d'un incunable de 14905. D'autres déclinaisons en sont parvenues jusqu'à nous bien qu'elles soient souvent tombées dans
un oubli assez complet. Elles n'ont de cesse de nous plonger dans l'atmosphère des
cours de justice de l'Ancien Régime, certes vertueuses et solennelles, mais aussi
parfaitement ouvertes et sensibles à la poésie et à la satire. Il s'agit ainsi d'un Noël
auvergnat produit en 1665 lors des Grands-Jours de Clermont6, l'une de ces assises
extraordinaires que les rois de France envoyaient tenir par leurs commissionnaires
ou tenaient eux-mêmes dans les provinces éloignées de la capitale. Il s'agissait là de
leur dernière manifestation, sur ordre de Louis XIV. Au-delà de l'impact judiciaire
1. H. ADER et A. DAMIEN, Règles de la profession d'avocat, Dalloz, 2016.
2. Y. AVRIL, Responsabilité des avocats, civile, disciplinaire, pénale, Dalloz, 2015-2016.
3. B. BEIGNIER et J. VILLACÈQUE (dir.), Droit et déontologie de la profession d'avocat, Gazette du Palais, 2016. Dans notre
ouvrage, il pourra être repéré des traces de l'ancien travail de feu le bâtonnier Bernard Blanchard (1944-2012)
pour l'avant-dernière édition de son texte : B. BLANCHARD, « L'avocat et l'argent » in B. BEIGNIER, B. BLANCHARD et
J. VILLACÈQUE (dir.), Droit et déontologie de la profession d'avocat, Gazette du Palais, 2007.
4. I. Collectif, Recueil des statuts, ordonnances, reiglements, antiquitez, prerogatives, & preéminences du Royaume de
la Bazoche, Claude Bonjean, 1644. II. A. FABRE, Études historiques sur les clercs de la bazoche, Potier, 1856.
5. Anonyme, Pathelin (« Explicit maistre pierre pathelin imprime a paris au saumon devant le palais par germain
beneaut imprimeur le xxme jour de decembre l'an mil iiii c iiii xx et dix »), Germain Beneaut, 1490, folio aiii,
4e ligne, consultable sur Gallica, site en ligne de la BNF.
6. I. Anonyme, Recueil des arrests, declarations, lettres patentes du roy, reglemens, ordonnance, & instructions de la
cour des grands-jours tenus à Clermont en Auvergne l'an M. DC. LXV. & LXVI., N. Iacquard, Clermont, 1666. II.
N. DONGOIS, « Les Grands-Jours de Clermont, registres tenus par le greffier Dongois (1665-1666) », in L'Auvergne
historique, littéraire et artistique - 10e année, Clermont-Ferrand, 1904. III. E. FLÉCHIER, Mémoires sur les grands jours
d'Auvergne, avec une introduction de Maurice Garçon, Vialetay, 1968. IV. A. LEBIGRE, Les Grands Jours
d'Auvergne, Hachette, 1976. V. E. FLÉCHIER, Mémoires sur les grands jours d'Auvergne, édités par Yves-Marie
Bercé, Le Mercure de France, 1984.

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