Les Carrés Rouge - L'essentiel des grands arrêts du droit de l'environnement 2017-2018 - 1re - 103

CHAPITRE 4 - La responsabilité environnementale et le préjudice écologique

9 CA Angers, 9 déc. 2008, Syndicats professionnel
et Confédération paysanne des Deux-Sèvres
« ... En matière environnementale, le lien causal entre la faute et le préjudice subi doit être apprécié en considération du
risque accru de provoquer le dommage inhérent à l'activité dangereuse que représente l'usage des produits
phytosanitaires ; Il importe peu, par ailleurs, que l'usage de ces produits n'ait pas été la cause exclusive des pertes subies
par les apiculteurs dès lors qu'il est démontré, avec un degré de pertinence et de certitude suffisant, qu'il a joué un rôle
dans l'apparition des dommages... ».

■ Faits
Suite à une augmentation importante de la surmortalité des abeilles par intoxication des abeilles butineuses pouvant
aller jusqu'à la disparition complète de certains ruchers, deux apiculteurs portent plainte en mars 2001 avec derrière
eux, sept syndicats professionnels et la Confédération paysanne des Deux-Sèvres. Les apiculteurs, organisés autour des
associations représentatives des professions apicoles entament ainsi une action contre un fournisseur de produits de
traitement fongicide et insecticide utilisé à proximité des ruchers. Suivra la nomination et démission de plusieurs
experts dont certains rapports sont annulés pour défaut de procédure en juillet 2007. Le tribunal d'instance d'Angers
déboute alors les apiculteurs qui font appel. Le 9 décembre 2008, la cour d'appel d'Angers leur donne enfin raison.

■ Portée
Il s'agit ici d'une des premières décisions importantes en matière de pesticides et de leurs effets nuisibles sur les populations d'abeilles. La décision est à saluer car il s'agit de la prise de conscience des professionnels du milieu apicole des
effets mortels des pesticides sur leurs ruches et sur l'augmentation alarmante de la mortalité des abeilles.
La cour d'appel d'Angers admet la responsabilité de Terrena responsable des dommages subis en avril 2000 par les
ruchers exploités par deux apiculteurs du nord des Deux-Sèvres. Il est reproché à la coopérative d'avoir conseillé à ses
adhérents le mélange d'un insecticide et d'un fongicide qui serait à l'origine de la mortalité des abeilles. Cette
condamnation ne repose pas sur l'établissement d'un lien de causalité clairement établi, ni sur une expertise contradictoire, mais elle met en évidence la responsabilité de fait de la coopérative qui distribue ces produits phytosanitaires.
La Cour reconnaît également l'existence d'un préjudice moral pour les associations et les syndicats représentatifs des
professions apicoles qui ont pour objet de veiller à l'émergence d'activités agricoles s'inscrivant dans un objectif de
développement durable. Ces groupes sont recevables et bien-fondés à poursuivre la réparation de leur préjudice moral
au regard de la gravité de l'atteinte portée à l'environnement par les traitements. Suite à cette décision, Terrena a
accepté d'ouvrir un dialogue avec les apiculteurs afin de trouver des solutions pour l'avenir de l'apiculture et de
l'agriculture.

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