Mémentos LMD - Droit pénal général 2016-2017 - 11e - 107

CHAPITRE 5 - Le préalable légal : composante externe de l'infraction 107 Exemple Dans un arrêt remarqué, la Chambre criminelle rejetait le pourvoi d'un individu qui reprochait aux juges du fond de l'avoir privé du bénéfice de la légitime défense en retenant la qualification d'infraction involontaire. En l'espèce, lors d'une querelle, l'individu, le sieur Cousinet avait brutalement repoussé un ivrogne qui s'était grièvement blessé en tombant. Bien que dépourvu de toute ambiguïté, la décision du 16 février 1967 a été assez sévèrement critiquée par la doctrine. Sur le fond, la critique porte, en méconnaissance du principe de la légalité, sur la création de la Cour souveraine. Sur l'esprit, chacun peut relever la singularité : le coup volontaire (donné pour se défendre) peut être justifié, alors que l'acte involontaire ne peut l'être. Qu'en est-il aujourd'hui devant le silence constant du Code pénal ? La meilleure doctrine, c'est le cas notamment de J. Pradel, relève que la Cour de cassation pourrait, prétextant la nouvelle terminologie de l'article 122-5, revoir sa position. Rien n'est moins sûr ! Dans un arrêt du 21 février 1996, les magistrats de la cour souveraine ont validé le bénéfice de la légitime défense alors que les faits de l'espèce relevaient manifestement un acte involontaire. Un coup de feu avait tiré lors d'un geste de recul. Sans minimiser cette décision, il faut noter que les magistrats ont gardé le silence sur le caractère non intentionnel de l'acte. Pour aller plus loin Conséquence pratique du caractère inconciliable entre la légitime défense et le caractère involontaire de l'infraction En pratique, l'arrêt Cousinet a engendré quelques difficultés liées à la qualification. On a même pu voir un individu poursuivi, cherchant à invoquer la légitime défense, tenter de prouver qu'il avait commis un crime et non un délit, tenter de prouver que l'élément moral de l'infraction se caractérisait bien par la volonté de tuer ou de porter des coups délibérés. Prenant acte de cette motivation, les magistrats de la cour d'appel déclinaient la compétence de la juridiction correctionnelle au profit de celle de la Cour d'assises. Les faits reprochés pouvaient en effet alors revêtir la qualification criminelle de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Pour la petite histoire, l'artifice a fonctionné. L'individu, finalement traduit en Cour d'assises, a été acquitté (c'est la célèbre affaire Legras, dite du transistor piégé). Ce qui a engendré, du même coup, de nouvelles critiques doctrinales. La doctrine moderne affine la critique qui peut être adressée à la solution de l'arrêt Cousinet. Un auteur a parfaitement montré que « la non-intention se caractérise par le défaut de volonté du résultat et non par une absence totale de volonté dans le comportement ». Aussi, après d'autres, on peut donc imaginer une défense résultant d'un acte volontaire dont le résultat n'aurait absolument pas été voulu. Tel est en substance, le message de censure adressé par la Chambre criminelle à une cour d'appel qui s'était retranchée à l'occasion d'une poursuite correctionnelle derrière la jurisprudence classique du caractère inconciliable entre la légitime défense et le caractère involontaire de l'agression, sans rechercher si l'examen des faits pouvait révéler leur caractère intentionnel. Pour conclure sur la légitime défense, il reste à noter de quelle façon celle-ci doit être prouvée. En ce domaine, le législateur de 1810 comme celui de 1994 a organisé des cas privilégiés.

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