Mémentos LMD - Principes fondamentaux de droit constitutionnel - 11e - 96

MÉMENTOS LMD - PRINCIPES FONDAMENTAUX DE DROIT CONSTITUTIONNEL

interprète les textes. De même que l'interprète de la loi détient un pouvoir législatif,
l'interprète de la constitution exerce un pouvoir constituant ».
Certes, le juge s'en tient en principe à un contrôle strictement juridique, sans considération d'opportunité politique. Néanmoins, la légitimité des juges pour exercer de telles
attributions a parfois été contestée. La critique du gouvernement des juges, qui a
ressurgi en France à l'occasion de la montée en puissance du Conseil constitutionnel,
avait d'abord visé la Cour suprême des États-Unis, que l'on a parfois accusée de réécrire
la Constitution selon son gré : « la Constitution est ce que la Cour suprême dit qu'elle
est ». C'est d'ailleurs aux États-Unis que le contrôle juridictionnel a fait son apparition,
avant de connaître un formidable développement.

2) Sa mise en œuvre : l'exemple des États-Unis
Dès l'adoption de la Constitution des États-Unis d'Amérique, et, plus encore, du Bill of
Rights qui y a été ajouté en 1791, les constituants américains se sont interrogés sur le
meilleur moyen de protéger les libertés du peuple. Eux aussi comparèrent les mérites
respectifs des contrôles politique, populaire et juridictionnel, pour faire respecter le
principe de suprématie de la Constitution fédérale, consacré à l'article VI du texte
fondamental.
Constitution des États-Unis de 1787, article VI :
« La présente Constitution, et les lois des États-Unis qui seront prises pour son application, et
tous les traités conclus, ou qui seront conclus, sous l'autorité des États-Unis, seront la loi
suprême du pays ; et les juges dans chaque État seront liés de ce fait, nonobstant toute disposition contraire dans la Constitution ou les lois de l'un quelconque des États ».

Cette suprématie fut effectivement garantie à partir de 1803, grâce au contrôle juridictionnel exercé dans le cadre du judicial review. En effet, à l'occasion de l'affaire
Marbury contre Madison (v. encart Chapitre 7), la Cour suprême s'est reconnue, sous
l'influence de son président John Marshall, le pouvoir de contrôler la conformité des
lois et des règlements fédéraux à la Constitution fédérale. Plus encore, constatant que
« l'interprétation des lois est sans conteste l'apanage du pouvoir judiciaire », elle a
estimé que c'était même le devoir des juges ordinaires que de refuser d'appliquer les
lois inconstitutionnelles afin de faire prévaloir la loi suprême. Elle a élargi le contrôle de
constitutionnalité aux lois des États fédérés en 1810 (affaire Fletcher versus Peck).
Aux États-Unis, la Cour suprême joue un rôle déterminant dans le fonctionnement de
l'État fédéral comme dans la vie politique américaine. En délivrant une interprétation
évolutive de la Constitution (« living constitution »), elle a accompagné, parfois freiné,
d'autres fois accéléré le processus de modernisation de la démocratie américaine.

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