42 NOTE DE SYNTHÈSE Cette question est cependant totalement absente des programmes des candidats à l'élection présidentielle (à l'exception notable d'Emmanuel Macron qui propose la création d'un service public numérique de la justice). Une mesure simple serait la numérisation totale des dossiers : un moyen simple et efficace de réduire les délais de procédure comme c'est déjà le cas pour les contentieux administratifs. Il faut toutefois être encore plus ambitieux et oser introduire les innovations technologiques dans la justice pénale. Dans les procédures d'enquête, le Big data peut être un atout exceptionnel. Dans son rapport sur le numérique et les droits fondamentaux, le Conseil d'État relève : « Le Big Data ouvre la voie à de nouvelles méthodes de recherche scientifique fondée sur l'induction à partir de l'observation de corrélations statistiques et non plus la déduction à partir d'hypothèses préalables. » Certains ont pu y lire la possibilité de détecter les comportements suspects à partir de masses de données analysées en temps réel. Ce type d'innovation doit être strictement encadré pour qu'il ne débouche pas sur la surveillance généralisée façon Minority Report ou Matrix. Pour ce qui concerne les phases de jugement, l'intelligence artificielle est un bon moyen de désengorger les tribunaux pour les petites affaires comme pour les contentieux les plus importants. L'université UCL a mis au point un logiciel d'intelligence artificielle capable d'aboutir aux mêmes décisions que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Les chercheurs ont analysé 584 décisions de la CEDH portant sur les articles 3, 6 et 8 de la Convention. Dans 79 % des cas, le logiciel d'intelligence artificielle est arrivé aux mêmes conclusions que la Cour. Risque d'erreur humaine En France, il est possible de mettre au point un logiciel similaire capable de résoudre les contentieux à partir de la jurisprudence déjà établie. La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique impose désormais la mise à disposition du public de toutes les décisions de justice. Cela représente plusieurs millions de décisions qui vont pouvoir être analysées par l'intelligence artificielle pour proposer au cas par cas des solutions aussi bien en matière civile et administrative que pénale. Ce type d'innovation est déjà à l'œuvre puisque la start-up Predictice propose dès à présent de calculer les probabilités de succès d'un litige et les dommages et intérêts susceptibles d'être prononcés. L'intelligence artificielle fait disparaître le risque d'erreur humaine et assure à chacun que sa cause sera entendue par un tribunal effectivement impartial et indépendant. Un logiciel d'intelligence artificielle n'est pas susceptible d'être influencé par les biais cognitifs dont souffrent parfois les juges. À titre d'exemple : 1. une étude américaine a révélé que les personnes noires étaient bien plus susceptibles d'être injustement reconnues coupables d'infraction que les personnes blanches. Selon les chercheurs du National Exoneration Service, bien que les Noirs représentent 13 % de la population américaine, ils comptent pour 47 % des 1 900 victimes d'erreurs judiciaires depuis 1989.