Mémentos LMD - Les institutions de la Ve République 2017-2018 - 10e - 134

134

E

MÉMENTOS LMD - LES INSTITUTIONS DE LA V RÉPUBLIQUE

2) Les prérogatives confiées au pouvoir exécutif pour la défense
de son domaine
La délimitation du domaine de la loi a été conçue pour protéger le champ d'action du
pouvoir exécutif. Celui-ci a donc été doté par le Constituant de deux armes spécifiques
lui permettant de résister aux assauts du législateur. Elles sont prévues aux articles 37
alinéa 2 et 41 de la Constitution et impliquent l'intervention du Conseil constitutionnel, « organe régulateur des pouvoirs publics » chargé, dès 1958, de veiller au
respect des articles 34 et 37 de la Constitution, sur demande du gouvernement.
Mais cette logique de confrontation n'a plus grand sens, dans un système de parlementarisme majoritaire où le gouvernement et sa majorité parlementaire font bloc et partagent l'exercice de la fonction législative. C'est ainsi que la protection du domaine de
la loi change d'objectif : il ne s'agit plus de « protéger le gouvernement », mais de
contribuer à l'amélioration de la qualité des lois, en luttant contre le phénomène
d'inflation législative (loi qui se perd dans les détails réglementaires).
Depuis le 23 juillet 2008, l'article 41 de la Constitution a ainsi changé de physionomie :
le gouvernement partage avec les présidents des assemblées l'initiative d'opposer l'irrecevabilité constitutionnelle afin d'éviter que la loi n'empiète sur le domaine du pouvoir
réglementaire. L'article 37 al. 2 permet, en toute hypothèse, au gouvernement de rester
le maître du jeu et de récupérer sa compétence réglementaire au besoin.
La délégalisation (ou déclassement)
Const., art. 37 al. 2,

L'irrecevabilité constitutionnelle
Const., art. 41,

Définition

Cette procédure est prévue pour
remédier, a posteriori, à un empiétement
du législateur dans le domaine
réglementaire.

Déclenché pendant la procédure législative,
ce mécanisme est préventif.
Il vise à empêcher le législateur d'empiéter
dans le domaine réglementaire.

Procédure

Deux hypothèses sont distinguées :
- soit l'acte a été adopté sous la forme
d'une loi avant 1958 (c'est-à-dire avant
l'instauration du domaine de la loi) : il
peut être directement modifié par décret,
après avis du Conseil d'État ;
- soit l'acte a été adopté sous la forme
législative après 1958 (postérieurement à
l'instauration de la distinction des
domaines législatif et réglementaire). Il
revient au Conseil constitutionnel de
constater l'empiétement du législateur, et
de vérifier le caractère réglementaire de la
disposition préalablement à sa
modification par décret en Conseil d'État.

Le gouvernement ou, depuis le 23 juillet
2008, le président de l'assemblée saisie, peut
opposer l'irrecevabilité à une proposition de
loi ou à un amendement parlementaire qui
dépasse le cadre du domaine de la loi.
En cas d'initiative du gouvernement, le
président de l'assemblée concernée est invité
à confirmer ou à infirmer l'irrecevabilité
soulevée.
En cas de divergence d'interprétation sur le
caractère réglementaire ou législatif de la
disposition en cause, le Conseil
constitutionnel tranche la question dans un
délai de 8 jours.

Effet

L'acte en cause est donc « déclassé » ou
« délégalisé » : il perd son caractère
législatif, ce qui permet de le modifier par
la voie réglementaire

Interruption de la procédure législative et
abandon de la disposition irrecevable.
NB : le gouvernement peut aussi faire
respecter le champ d'une habilitation
législative fondée sur l'article 38, Const.

Remarque : c'est bien la mission initiale du Conseil constitutionnel que d'arbitrer les
différends relatifs à la mise en œuvre de la délimitation du domaine de la loi. Entre
1958 et le 1er juillet 2017, il a été saisi 269 fois sur le fondement de l'article 37 alinéa 2
Table des matières de la publication Mémentos LMD - Les institutions de la Ve République 2017-2018 - 10e
