Mémentos LMD - Les institutions de la Ve République 2017-2018 - 10e - 73

CHAPITRE 3 - Le gouvernement

siège au Parlement : celui-ci conservait ses attaches partisanes pendant l'exercice de ses
fonctions ministérielles et, en cas de crise gouvernementale, il revenait simplement siéger
sur les bancs du Parlement, dans l'attente d'une éventuelle nomination à un « portefeuille
ministériel » dans le nouveau gouvernement. Ce « jeu des chaises musicales » est considéré comme l'un des facteurs de l'instabilité gouvernementale chronique de cette
époque. Cependant, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 est revenue sur le dispositif prévu en 1958. Elle modifie le mécanisme de suppléance, en prévoyant le « remplacement temporaire » des députés et sénateurs « en cas d'acceptation par eux de fonctions
gouvernementales ». L'incompatibilité entre le mandat parlementaire et la fonction ministérielle demeure, mais les élus concernés peuvent désormais retrouver automatiquement
leur siège au Parlement à la fin de leur mission gouvernementale (Const., nouvel art. 25).
Ils n'ont plus à attendre, comme auparavant, la fin du mandat de leur suppléant ou à
obtenir l'organisation d'élections anticipées pour retrouver leur siège.
Remarque : outre les incompatibilités prévues par les textes, certains Premiers ministres
ont parfois imposé à leurs ministres de renoncer à leurs fonctions exécutives locales
(L. Jospin en 1997, E. Philippe en 2017), ce qui pourrait être consacré par la loi sous le
quinquennat d'Emmanuel Macron

2) Un régime de responsabilité pénale spécifique
Afin de protéger les ministres contre d'éventuelles manœuvres de déstabilisation, les articles 68-1 et 68-2 de la Constitution organisent à leur profit un régime de responsabilité
pénale spécifique pour les crimes ou délits commis dans l'exercice de leur fonction. En
effet, ils sont alors jugés par la Cour de justice de la République, créée par la révision
constitutionnelle du 27 juillet 1993 et composée de quinze juges, parmi lesquels douze
parlementaires élus par leurs pairs (et trois magistrats du siège à la Cour de cassation). La
procédure, précisée par une loi organique, fait intervenir le procureur général de la Cour de
cassation et une commission des requêtes chargée de filtrer les recours adressés par les
particuliers s'estimant lésés par un crime ou un délit commis par un ministre. L'acte reproché
doit avoir été commis par le ministre dans l'exercice de ses fonctions, c'est-à-dire avoir un
rapport direct avec la conduite des affaires de l'État relevant de ses attributions.
Exemple

En 1999, trois anciens ministres (Mme Dufoix, MM. Fabius et Hervé) ont été renvoyés
devant la Cour de justice de la République pour répondre de plusieurs chefs d'accusation
dans l'affaire du sang contaminé (délits d'homicide involontaire et de blessures par imprudence). Seul Edmond Hervé fut condamné, pour manquement à une obligation de sécurité
ou de prudence (il fut dispensé de peine).
Le 30 avril 2010, la Cour a condamné Charles Pasqua à un an de prison avec sursis dans un
dossier lié à ses fonctions en tant que ministre de l'Intérieur entre 1993 et 1995, et l'a
relaxé dans deux autres affaires. En 2013, c'est en tant que ministre de l'Économie,
chargée du règlement du litige entre B. Tapie et le Crédit Lyonnais, que Christine Lagarde
est mise en cause devant la Cour de justice de la République.

Remarque : pour les actes de sa vie privée, accomplis en dehors de l'exercice de ses
fonctions, le ministre reste un justiciable ordinaire.

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