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216 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS 646. L’émergence progressive au sein de l’administration d’une juridiction administrative a conduit à la création prétorienne du droit administratif. Les règles générales du droit administratif ont été créées par le juge, dans les motifs de ses jugements, ou grâce à la répétition de solutions d’espèce identiques. 647. Les jugements des juridictions administratives ne sont en principe pas censurés par les juridictions supérieures sur le fondement de l’article 5 du Code civil, qui n’a d’ailleurs pas été repris dans le livre préliminaire du Code de justice administrative. Toutefois, à l’occasion d’un litige concernant l’implantation sur une parcelle du Bois de Boulogne d’un restaurant « Le Pavillon Royal », la société requérante a fait appel du jugement rendu par le tribunal administratif de Paris en prétendant que ce dernier, en constatant que le Bois de Boulogne faisait partie du domaine public, avait fait acte de règlement de portée générale, et, ce faisant, violé l’article du Code civil. La Cour administrative d’appel de Paris a accepté d’examiner le moyen et affirmé qu’au contraire, le tribunal administratif avait « statué sur le litige particulier dont il était saisi » et en a donc conclu que le moyen ne pouvait être retenu68. 648. Le professeur Yves Gaudemet estime néanmoins que si « la prohibition de l’arrêt de règlement n’est sans doute pas d’origine pour le « juge » administratif ; et (…) ne lui vient pas du Code civil, elle s’impose à lui sur le fondement du principe de la séparation des pouvoirs « dès lors qu’il est vraiment juge et dans cette mesure aussi »69. À l’instar de François Terré qui distingue les arrêts de principe des arrêts de règlement, Yves Gaudemet évoque une « différence fondamentale qui sépare, d’un côté, l’arrêt de règlement, forme spéciale de décision des anciens parlements et relevant, dans un système de confusion des pouvoirs, de l’acte d’administration et, d’un autre côté, le phénomène de la jurisprudence »70. Ainsi, « la prohibition de l’arrêt de règlement s’adresse au dispositif de la décision du juge : celui-ci ne peut avoir la portée d’une réglementation ; tandis que la jurisprudence est tout entière dans les motifs »71. 649. Le dispositif d’un jugement ne doit donc pas avoir une portée générale. C’est ce que l’on peut déduire de l’arrêt du Conseil d’État du 3 novembre 1961, École technique Saint-Joseph, où était attaquée par la voie du recours pour excès de pouvoir, une délibération prise par une juridiction administrative spéciale, un comité départemental de l’enseignement technique, fixant les règles concernant les exonérations de la taxe d’apprentissage au profit des entreprises subventionnant elles-mêmes directement certains établissements d’enseignement technique. La qualification de cette délibération de décision juridictionnelle appelait la compétence des juridictions administratives d’appel tandis que celle d’acte administratif entraînait celle du Conseil d’État – le champ d’application d’une telle décision excédant par ailleurs le ressort d’un seul tribunal administratif. La Haute juridiction administrative s’estime compétente : « Considérant d’une part que, par cette délibération, le Comité 68. CAA Paris, 19 sept. 1989, SA « Le Pavillon Royal », T. Leb., p. 549 et 674. Après une recherche par mots clefs sur Légifrance, il ne semble pas qu’il y ait d’autres arrêts se référant ainsi à l’art. 5, C. civ. 69. Y. GAUDEMET, « L’arrêt de règlement dans le contentieux administratif », Mélanges en l’honneur de Daniel Labetoulle, Juger l’administration, administrer la justice, Paris, Dalloz, 2007, p. 387-403, ici p. 395. 70. Ibid., p. 397. 71. Ibid., p. 398.

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