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282 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS sans articulation entre elles. Il semble a priori que les deux catégories se croisent : certains fichiers sont des documents administratifs mais pas tous. Le tribunal administratif a donc créé un rapport de spécialité en considérant que les fichiers étaient une sous-catégorie de documents administratifs. 835. Ainsi la règle specialia generalibus derogant dispose-t-elle, selon l’expression d’Antoine Jeammaud, d’« un pouvoir d’attraction »20. En cas de croisement entre les champs d’application de deux normes incompatibles, le juge résout le conflit en établissant un rapport d’espèce à genre entre celles-ci. 2. La délicate détermination de la nature du rapport entre le droit civil et le droit administratif 836. Le droit civil est couramment considéré comme le droit commun au regard du droit administratif, c’est-à-dire comme un ensemble de règles générales qui s’appliquent automatiquement en l’absence de règles spéciales contraires. Les expressions « règles générales » et « droit commun » sont ici tenues pour synonymes, même si certains auteurs estiment que « le droit commun a toujours été plus qu’un ensemble de règles générales », parce qu’ils le considèrent comme l’expression de la raison, ou bien comme « la structure normale choisie pour régir la matière considérée »21. 837. Nul n’ignore que dans l’arrêt Blanco, le Tribunal des conflits a estimé que « la responsabilité, qui peut incomber à l’État, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier ; que cette responsabilité (…) a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l’État avec les droits privés »22. Bien avant, dans un avis du 12 juin 20. A. JEAMMAUD, Des oppositions de normes en droit privé interne, thèse (dactylographiée), Lyon 3, 1975, ici p. 686 L’auteur donne notamment l’exemple de l’art. 215, al. 4, C. civ. – « Les époux ne peuvent l’un sans l’autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni » – qui n’entretient aucune relation logique d’opposition, ni de relation d’espèce à genre, avec celle de l’art. 1428, C. civ. – « Chaque époux a l’administration et la jouissance de ses biens propres et peut en disposer librement ». Pourtant, l’article 215 est interprété comme une règle spéciale excluant l’application de la norme signifiée par l’article 1428 (TGI Paris, 16 déc. 1979, Gaz. Pal. 1971. I. 115). V. aussi, toujours en droit privé : B. SAINTOURENS, Essai sur la méthode législative : droit commun et droit spécial, thèse dactylographiée, Bordeaux I, 1986, p. 161 : à propos de generalia specialibus derogant, l’auteur déplore « l’usage abusif qui est fait de cette maxime, ce qui diminue d’autant sa crédibilité. Le recours à cette maxime est en effet admis, en jurisprudence et en doctrine, pour des hypothèses qui ne mettent pas en présence des normes figurant dans un rapport de genre à espèce ». Il donne l’exemple des articles 1110 et 1644 du Code civil, concernant respectivement l’action en nullité pour erreur sur les qualités substantielles et l’action en garantie des vices cachés de la chose objet du contrat. Pour l’action en nullité pour erreur, le délai d’action est de cinq ans (art. 1304, C. civ.) ; l’action en garantie des vices doit être engagée dans le « bref délai » de l’article 1648. La Cour de cassation a estimé que l’action en nullité pour erreur est soumise au bref délai qui est imposé à l’action en garantie des vices (Civ. 1re, 19 juill. 1960, Bull. civ. I. p. 334, n° 408 ; Gaz. Pal. 1960, 2, 217 ; RTD civ. 1961, p. 332, n° 1, obs. Carbonnier). L’article 1644 prévaut donc sur l’article 1110, ce que le doyen Carbonnier explique par l’adage specialia generalibus derogant. Or, Bernard Saintourens estime au contraire que l’action en garantie des vices cachés n’est pas un cas particulier de l’action en nullité pour erreur. 21. V. notamment C. GOLDIE-GENICON, Contribution à l’étude des rapports entre le droit commun et le droit spécial des contrats, préf. de Y. Lequette, Paris, coll. « Bibliothèque de droit privé », t. 509, 2009, p. 6-7. 22. TC, 8 févr. 1873, Blanco, Leb., p. 61, concl. David, D. 1873.3.17, concl. ; S. 1873.3.153, concl. - souligné par nous. http://www.22.TC

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