Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 308)

290 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS relative à la motivation des actes administratifs. Celui-ci prévoit que « doivent également être motivées les décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement »56, telles que les décrets autorisant la société Air Inter à affréter occasionnellement des aéronefs étrangers, alors que le code de l’aviation civile prévoit que le transport aérien commercial des personnes et des marchandises entre deux points situés dans le territoire français, en métropole et outre-mer est réservé aux aéronefs français, ou encore les permis de construire délivrés en dérogation à un plan d’occupation des sols57, etc. 858. Ont également été considérées par le juge administratif comme des « décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales » au sens de l’article 2 de la loi du 11 juillet 1979, les autorisations d’ouverture d’officine prises en vertu de l’avant dernier alinéa de l’article L. 571 du Code de la santé publique et accordées par le préfet par dérogation aux règles posées par les alinéas précédents « lorsque les besoins de la population l’exigent »58. De même, la décision préfectorale qui autorise, sur le fondement de l’article L. 594 du Code de la santé publique précité, l’exercice de la pharmacie par un médecin, alors que l’article L. 512 le réserve aux pharmaciens, entre dans le champ d’application de l’article 2 de la loi du 11 juillet 197959. 859. Néanmoins, le Conseil d’État a adopté une conception restrictive de la notion de « décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement » visée par l’article 2 de la loi du 11 juillet 1979, ce qui a pour conséquence de restreindre considérablement le champ d’application de l’obligation de motivation. Il tend à considérer que les décisions individuelles sont prises sur le fondement de règles générales indépendantes et non sur le fondement de règles spéciales dérogatoires et échappent de ce fait à l’obligation de motivation. sa chronique « Lois spéciales et droit commun » qu’il s’agit bien d’une règle spéciale au regard de l’article 1382 (op. cit., D. 1961, chron. XVIII, p. 91) tandis qu’ Antoine Jeammaud, dans sa thèse sur les oppositions de normes en droit privé interne (op. cit., p. 674), critique cette position car « il est manifeste que le fait d’une chose inanimée ne constitue pas un cas particulier du fait de l’homme ! ». La Cour de cassation a finalement recconu la « portée générale » aussi bien de la responsabilité du fait personnel que de celle du fait des choses, admettant ainsi leur indépendance, et par voie de conséquence, leur application cumulative (Cass. Civ. 2e, 31 janv. 1963, Bull. civ. II, n° 109, p. 80 : « la responsabilité du fait des choses inanimées dont on a la garde n’exclut pas celle du fait personnel qui, distincte de la précédente, a une portée générale » ; v. aussi : Cass. civ. 2e, 17 oct. 1963, Bull. civ. II, n° 642, p. 480 : « la responsabilité du fait personnel et celle du fait des choses ont leur domaine propre ; (…) elles peuvent dès lors être cumulativement invoquées » ; et J. BORÉ, « Le cumul de la responsabilité du fait personnel et de la responsabilité du fait des choses », JCP 1965. I. 1961). Il convient de souligner que la règle du cumul n’a été consacrée que tardivement, dans les années soixante, ce qui montre bien que le fait de considérer la responsabilité du fait des choses comme une catégorie indépendante de celle du fait personnel n’allait pas de soi. Il n’était pas insensé de penser que la responsabilité du fait des choses constituait une sous-catégorie de la catégorie « responsabilité du fait personnel », dérogeant à l’exigence d’une faute en cas de dommage causé par le fait d’une chose inanimée. La distinction entre l’indépendance et le rapport de spécialité entre deux normes est donc ténue. 56. Loi n° 79-587 du 11 juill. 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, JO du 12 juill. 1979, p. 1711. 57. CE, 17 déc. 1982, Société Angelica-Optique Centraix et autre, Leb., p. 419. 58. CE, 3 nov. 1982, Mlle Mugler, T. Leb., p. 505 ; CE, 16 févr. 1983, Mme Vigne, T. Leb., p. 596 ; AJDA 1983, p. 296, chron. ; CE, 6 déc. 1993, Mme Bresson-Klein, req. n° 105070, inédit au Lebon. 59. CE, 20 janv. 1988, Maugoussin, T. Leb., p. 574.

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