Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1 - (Page 412)

394 LES RÈGLES GÉNÉRALES EN DROIT PUBLIC FRANÇAIS 1145. Ceci étant, Yann Aguila, dans ses conclusions sur l’arrêt Commune d’Annecy, affirmait le contraire… Effectivement, l’absence d’effet direct ne va pas de soi, ce qui explique d’ailleurs que le Conseil d’État ait choisi d’éviter de se prononcer sur ce point dans l’arrêt Fédération transpyrénéenne des éleveurs de montagne et autres. C’est à tort que l’on met en parallèle l’absence d’effet direct des dispositions constitutionnelles renvoyant à la loi à défaut de mesures législatives d’application avec le cas des dispositions constitutionnelles ou législatives non applicables faute de loi organique ou de décrets d’application. Dans ces deux derniers cas, l’absence de loi organique ou de décrets d’application empêche les dispositions constitutionnelles ou législatives d’entrer en vigueur, d’être applicables. Or, l’effet direct d’une règle, autrement dit son applicabilité directe, n’a rien à voir avec son entrée en vigueur, c’est-à-dire son applicabilité tout court. Et nul ne songe à contester le fait que toutes les dispositions de la Charte sont bien déjà entrées en vigueur : ce n’est pas l’applicabilité des divers articles de la Charte qui pose problème, mais uniquement leur applicabilité directe. 1146. Sans se répondre expressément à la question, la Haute juridiction administrative a apporté d’importants éléments de réponse dans l’arrêt du 19 juillet 2010, Association du quartier Les Hauts de Choiseul, concernant le principe de précaution, énoncé à l’article 5 de la Charte de l’environnement. En raison de la constitutionnalisation dudit principe, le Conseil d’État a fini par renoncer à la règle de l’indépendance des législations en reconnaissant que les dispositions de l’article 5 de la Charte, « qui n’appellent pas de dispositions législatives ou réglementaires en précisant les modalités de mise en œuvre, s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétence respectifs ; que, dès lors, en estimant que le principe de précaution tel qu’il est énoncé à l’article 5 de la Charte de l’environnement ne peut être pris en compte par l’autorité administrative lorsqu’elle se prononce sur l’octroi d’une autorisation délivrée en application de la législation sur l’urbanisme, le tribunal administratif d’Orléans a commis une erreur de droit »128. 1147. La formulation de l’arrêt mérite de retenir l’attention : le juge prend soin de souligner que les dispositions de l’article 5 « n’appellent pas de dispositions législatives ou réglementaires en précisant les modalités de mise en œuvre » puis il semble en déduire – il utilise l’expression « dès lors » – l’invocabilité de ces dispositions à l’encontre des autorisations d’urbanisme. En d’autres termes, l’effet direct du principe de précaution résulterait de l’absence de renvoi exprès à la loi pour sa mise en œuvre. Si on interprète l’arrêt a contrario, cela signifie que le renvoi exprès à la loi pour la fixation des conditions et limites des principes constitutionnels prive ces derniers d’effet direct, solution qui, comme nous venons de le voir, n’allait pas de soi. B. L’EFFET UTILE LIMITÉ DES RÈGLES CONSTITUTIONNELLES 1148. Selon certains membres de la doctrine, les droits et libertés garantis par des dispositions très générales ou les principes constitutionnels ne feraient l’objet que d’un contrôle juridictionnel limité, les juges constitutionnel et administratif 128. CE, 19 juill. 2010, Association du quartier Les Hauts de Choiseul c/ Commune d’Amboise, req. n° 328687, publié au Lebon ; AJDA 2010, p. 2114, note J.-B. Dubrulle.

Table des matières de la publication Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1

Biblio droit public - Les règles générales en droit public français -1