Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 74

États et marchés financiers

interventions des banques privées, sous la seule réserve de la capacité des
Banques centrales a coordonné leurs interventions. Comme l'a écrit M. Michel
Pébereau, « c'est la décision de la communauté internationale, dans les
années 1970, de s'en remettre au marché pour fixer la valeur des monnaies
qui est à l'origine du basculement dans un nouveau monde financier »57. Or, le
flottement des monnaies provoqua une hausse de l'inflation qui fut aggravée
par le premier choc pétrolier de 1974, correspondant au quadruplement des
prix à la production des produits pétroliers.

3. L'inflation fiscale
L'inflation fut également alimentée par une fiscalité qui restait lourde,
même au début des années 1970, dans l'ensemble des pays. Comme l'a
démontré M. Thomas Piketty, « dans tous les pays occidentaux, y compris
dans les pays anglo-saxons, la Première Guerre mondiale avait conduit à
l'adoption pour la première fois de taux marginaux supérieurs de l'ordre de
ceux adoptés en France (77 % aux États-Unis dès 1918), et les taux
marginaux supérieurs se stabilisèrent à des niveaux très élevés à partir de
la Seconde Guerre mondiale et pendant toute la période des "Trente
glorieuses" » : aux États-Unis, le taux marginal supérieur de l'impôt sur le
revenu, qui avait été porté à 91 % en 1941, resta à ce niveau jusqu'en 1964, et
même s'il fut réduit ensuite, il était toujours de 70 % entre 1970 et 1981, et il
« fut fréquemment alourdi par des majorations "exceptionnelles" de 10 %, si
bien que le taux supérieur était souvent de 77 % et non pas de 70 % au cours
de la période 1964-1981 » ; au Royaume-Uni, le taux marginal applicable aux
revenus du capital les plus élevés fut porté à 98 % à l'issue de la Seconde
Guerre mondiale et, à l'arrivée de Mme Thatcher au gouvernement en 1979, il
était encore de 83 % ; en France, il est resté globalement inchangé à 60 % de
1946 à 198258, « 50-60 % dans les bonnes années, 80-90 % dans les
mauvaises années »59 et, concernant l'impôt sur les sociétés, créé en 1948,
son taux, qui était initialement de 24 %, doubla dans les dix premières
années de son existence.
Ces prélèvements obligatoires élevés pesèrent beaucoup sur la
répartition de la valeur ajoutée et sur l'activité de marché. Au cours des
Trente Glorieuses, dans la plupart des pays industrialisés, « la part du
capital dans la valeur ajoutée diminua nettement, en raison d'une baisse
de la part des profits réalisés par les entreprises » et cela se traduisit
partout par « une baisse similaire des cours boursiers et de la
capitalisation boursière »60. La situation fut encore plus marquée en
57. PÉBEREAU M., « La finance ne serait-elle qu'un monde virtuel ? », revue Commentaire, hiver
2011-2012, nº 136, p. 885-890.
58. Exception faite des deux années 1964 et 1967 et sans tenir compte des majorations
exceptionnelles.
59. PIKETTY T., « Les inégalités dans le long terme », Conseil d'analyse économique, 2001, en
ligne. Nous changeons le temps des verbes, R.P.
60. BOZIO A., La capitalisation boursière en France, Mémoire de DEA, sous la direction de PIKETTY
T., 2002, en ligne.

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