Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re - 77

Le rôle des États dans la répression des marchés financiers au

siècle

années 1934-1936, à seulement un peu plus d'un dixième pour
1940-1944 »69.
Vichy remit en cause les titres aux porteurs, par la loi du 28 février 1941.
Cette réforme eut une portée considérable car, depuis la création de cette
formule en 1831 et la loi protectrice du 15 juin 1872 (cf. supra), l'essentiel des
titres étaient au porteur, puisque cette formule permettait la dissimulation
fiscale. En 1943, un commentateur soulignait que l'Italie fasciste avait pris
des dispositions comparables et il observait alors que « les abus commis au
nom d'un certain libéralisme, par l'anonymat du capital notamment, ne
paraissent pas avoir soulevé de nombreuses critiques et ne donnèrent pas
lieu, au cours du siècle passé, à une intervention des pouvoirs publics », de
sorte qu'il fallut « arriver à la période des régimes totalitaires pour assister
à une violente réaction dans ce compartiment de l'économie »70.
La loi du 3 février 1943 disposa ensuite que les actions de la plupart des
sociétés françaises devaient revêtir la forme nominative à moins d'être
placées en dépôt à la Caisse centrale de dépôts et de virements de titres
(CCDVT), qui avait été créée par la loi du 18 juin 1941 afin de faciliter le
recensement et la circulation des titres qui devaient être désignés par
arrêté ministériel. Henri Truchy et Auguste Murat ont justement observé
qu'« une telle mesure avait été, depuis la guerre de 1914, incessamment
demandée par les partis de gauche, notamment le parti socialiste, mais
pour résoudre un problème fiscal : on voulait atteindre le revenu des
valeurs mobilières, les plus-values spéculatives et le capital lui-même que
la forme nominative permettait de dissimuler dans les successions »71. À la
Libération, après la réouverture des marchés, en 1945 pour les valeurs
mobilières, en 1949 pour le marché à terme, un décret du 4 août 1949
supprima la CCDVT et la remplaça par la Société interprofessionnelle de
compensation des valeurs mobilières (SICOVAM), qui assura la même
mission d'organisation de la circulation des valeurs entre les
intermédiaires financiers.
Reprenant les procédés inventés par le régime de Vichy, la
IVe République utilisa d'abord le mécanisme du « circuit du Trésor », en
imposant aux principaux établissements financiers l'obligation de soutenir
la rente publique. Ainsi, en septembre 1948, furent institués les planchers
de bons du Trésor que les banques devaient obligatoirement détenir. De
même, en application du principe de l'unité de la trésorerie, les
établissements publics et collectivités locales restaient tenus de déposer
69. MARGAIRAZ M., L'État, les finances et l'économie. Histoire d'une conversion, 1932-1952, vol. 1,
Institut de la gestion publique et du développement économique, 1991, Comité pour
l'histoire économique et financière de la France, p. 541-590.
70. GOLAY J., « Actions au porteur ou actions nominatives : l'évolution de la société anonyme »,
Revue économique et sociale : bulletin de la Société d'Études Économiques et Sociales,
1943, nº 1, p. 30-44.
71. TRUCHY H. et MURAT A., Précis d'économie politique, 1953, Nouvelles éditions latines, p. 75.

Table des matières de la publication Systèmes Pratique - États et marchés financiers - 1re