Manuels - Introduction historique au droit (XIIIe-XXe siècle) - 4e - 205

L'État monarchique souverain absolue que le monarque tire de la souveraineté est encore renforcée par la théorie du droit divin. Pour Bossuet, « c'est dans les préceptes révélés par Dieu aux Hommes - le droit divin positif exprimé par la Parole divine que présente l'Écriture sainte - qu'il convient de trouver les principes pour penser, construire et mettre en œuvre le pouvoir politique »9. Ce lien à Dieu est ainsi une condition même de la souveraineté. Absolutisme ne signifie cependant pas que le roi puisse tout faire ni abuser de son autorité. §4. Les limites au pouvoir du souverain 220. D'absolu, le pouvoir ne doit pas devenir despotique ou tyrannique. Les théoriciens de la souveraineté royale et les défenseurs du pouvoir monarchique ont tous insisté sur les limites posées à l'autorité du roi. Trois séries de règles s'imposent au souverain : - a. Les lois de Dieu. Si l'origine divine du pouvoir royal renforce l'autorité du roi, elle a aussi comme conséquence que la politique royale doit impérativement être en conformité avec la volonté divine. Dans l'esprit des hommes du XVIIe siècle, il ne s'agit pas là d'une simple affirmation théorique, mais d'une norme juridique contraignante. La théorie du droit divin soumet les sujets au roi, mais elle subordonne tout autant le roi aux lois divines et à la morale chrétienne. Entre autres devoirs, le roi se doit d'agir avec modération et justice, en gouvernant par conseil et dans le respect des libertés tant des sujets que des corps. Louis XIV affirme dans ses Mémoires : « Exerçant ici bas une fonction toute divine, nous devons paraître incapables des agitations qui pourraient la ravaler ». - b. Les lois naturelles. Seconde limite à l'autorité du roi, elles imposent au prince d'agir pour le bien de l'État et de ses sujets et sont davantage invoquées à partir du XVIIIe siècle. Posant des limites à l'absolutisme royal, lois divines et lois naturelles dictent au roi des devoirs. - c. Les lois fondamentales. Ces règles, relatives au statut de la couronne et du domaine, s'imposent au roi. Elles sont tout à la fois un fondement essentiel de l'autorité monarchique, et une limite nette à la liberté d'action du roi (infra, nº 230 et s.). Si les théoriciens ont qualifié la souveraineté de puissance absolue, c'est-àdire parfaite, ils n'en ont jamais déduit le caractère « absolu » du pouvoir royal10. La monarchie que les historiens ont qualifiée d'absolue ne doit être 9. M.-F. RENOUX-ZAGAMÉ, « Droit divin », Dic. de la culture juridique..., p. 471. 10. J.-L. THIREAU, « L'absolutisme monarchique a-t-il existé ? », Revue française d'histoire des idées politiques, no 6, 1997, p. 291-309. Voir aussi : Louis XIV, qui résumait dans ses Entretiens : « Les rois, comme rois, n'ont rien à eux que le droit, ou plutôt le devoir, de tout conserver à la société dont ils sont les tuteurs et les chefs... La charge du souverain est le gouvernement de l'État, comme celle du père est le gouvernement de la famille. Les rois doivent plus à leurs peuples que les peuples ne doivent à leurs rois... Voici en deux mots les devoirs des souverains : défendre la nation contre l'injustice de ses voisins, et assurer sa tranquillité ; défendre la nation de sa propre injustice, et par là procurer son bonheur ». Sur le concept même d'absolutisme, voir : F. COSANDEY et R. DESCIMON, L'absolutisme en France ; histoire et historiographie, 205

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