Cours - Droit fiscal des affaires - 4e - 143

L'imposition du résultat de l'entreprise individuelle

sein des groupes de sociétés341. La charge supportée peut être en tout ou partie anormale.
Les situations rencontrées sont extrêmement variées.
146 On retrouve l'opération inverse à celle précédemment exposée, à savoir le cas de
l'acquisition par l'entreprise d'un bien immobilisé à un prix excessif. Une hypothèse voisine
est celle de l'apport effectué pour une valeur excédant la véritable valeur de l'apport342. Ces
situations, qui paraissent de prime abord anormales, n'entraînent pour autant pas d'effet en
elles-mêmes en ce qui concerne le bénéfice de l'entreprise. L'administration ne peut pas
venir prétendre qu'elle est en présence d'un acte anormal de gestion. En effet, l'opération
entraîne l'inscription du bien au bilan qui est contrebalancé par une sortie de liquidité, par
l'inscription au passif d'une dette envers le fournisseur d'immobilisation ou par une inscription dans le capital. Dès lors, le contrat ne génère aucune variation de l'actif net. Or, par
essence, la théorie de l'acte anormal de gestion ne concerne que l'imposition du bénéfice,
donc les charges et les produits, de sorte qu'elle ne peut jouer. En revanche, elle retrouve
sa pleine efficacité lorsque l'entreprise tire des conséquences de cette anormalité de
valeur, à travers des charges qu'elle entend déduire. À ce moment, l'administration peut
se prévaloir de leur caractère en tout ou partie anormal. Il en va ainsi notamment quand,
tenant compte du prix exagéré qu'elle a payé, l'entreprise passe ensuite une provision
pour dépréciation, par exemple de ses titres de participation343. Il en est de même lorsque

frais versées au PDG à titre de remboursement de frais de déplacement et de réception alors que l'intéressé avait la disposition
d'un véhicule qui appartenait à la société, Conseil d'État 11 décembre 1991, 8e et 9e sous-sections, nº 71 147, SA Oiffer, RJF 1992,
nº 2, comm. nº 185. Un autre exemple est celui du parrainage de l'activité sportive du chef d'entreprise, notamment en raison
de sa participation à un rallye automobile. Sous réserve que le financement ait pour contrepartie des retombées publicitaires
réelles pour l'entreprise (par exemple, le nom de l'entreprise ou de l'enseigne étant apposé sur le véhicule, l'événement est
commenté par la presse et la radio et sert de support à des actions commerciales de proximité) et que le chef d'entreprise
possède des capacités de pilote, il ne constitue pas un acte anormal de gestion pour l'entreprise ni une libéralité octroyée au
chef d'entreprise. Voir, Conseil d'État 21 janvier 1991, 7e et 9e sous-sections, nº 75 070, Société Normande de conditionnement et de
cosmétologie, RJF 1991, nº 3, comm. nº 258 - CAA de Bordeaux 7 février 1995, 3e chambre, nº 93-1497, Delage, RJF 1995, nº 5,
comm. nº 579 - CAA de Douai 28 mai 2003, 3e chambre, nº 99-20073, SA Transports Couque Maurice, RJF 2004, nº 4,
comm. nº 347 - CAA de Bordeaux 12 octobre 2006, 4e chambre, nº 03-856 et nº 03-857, Société Multicodis, Bull. fiscal 2007, nº 2,
comm. nº 129 ; RJF 2007, nº 2, comm. nº 124. Par ailleurs, les remboursements de frais au dirigeant ne sont pas nécessairement anormaux. Sont ainsi déductibles les frais de transport et de réception remboursés par une société à son dirigeant qui,
étant en charge de la clientèle, était amené à se déplacer pour visiter les clients, prospecter de nouveaux marchés et conclure
des contrats (ces frais n'étant pas disproportionnés par rapport à l'activité de l'entreprise, laquelle avait presque triplé en
quatre ans) ; il en est de même des frais liés à une ligne téléphonique, utilisée à des fins professionnelles, installée au domicile
du dirigeant (ce dernier possédant une autre ligne pour ses conversations personnelles), cf. Conseil d'État 16 juillet 2008,
10e et 9e sous-sections, nº 291400, Herout, RJF 2008, nº 11, comm. nº 1195.
341. Sur ce thème en général, F. DEBOISSY, Acte anormal de gestion et groupe de sociétés : orthodoxie juridique versus réalisme
économique ?, in Mélanges COZIAN, Litec, 2009, p. 263 et s. Par exemple, une société mère ne commet pas d'acte anormal de
gestion en procédant à la dissolution sans liquidation de sa filiale à 100 %, ce qui la rend débitrice de la totalité des dettes de
cette dernière en raison de la transmission universelle du patrimoine opéré par la dissolution (cf. l'article 1844-5 du Code civil),
plutôt qu'en la laissant poursuivre son activité déficitaire jusqu'à la cessation des paiements et l'ouverture d'une procédure
collective en vue de limiter sa responsabilité au montant des apports dans le capital de la filiale. Cf. Conseil
d'État 28 février 2007, 9e et 10e sous-sections, nº 274461, SA Piquant Buroti, RJF 2007, nº 5, comm. nº 545.
342. Conseil d'État 17 mars 1976, 7e et 8e sous-sections, nº 91 621, Sieur X, RJF 1976, nº 5, comm. nº 220. En matière de sociétés,
voir par exemple, Conseil d'État 27 avril 2001, 9e et 10e sous-sections, nº 212680, Sté générale de transport et d'industrie (GTI),
RJF 2001, nº 7, comm. nº 905 ; BDCF 2001, nº 7, comm. nº 87, conclusions J. COURTIAL ; Droit fiscal 2001, nº 41, comm. nº 909,
conclusions J. COURTIAL ; Droit des sociétés 2001, comm. nº 133, note J.-L. PIERRE ; Bulletin Joly sociétés 2001, § 226 note
J.-C. PAROT ; JCP 2001, éd. E, nº 49, p. 1967, commentaire D.F.
343. Conseil d'État 26 juillet 1982, Plénière, nº 19 645, SARL B, RJF 1982, nº 10, comm. nº 902. De même, une sous-filiale qui
consent une avance de trésorerie à sa « grand-mère » en difficulté avec laquelle elle n'entretient pas de relations commerciales,
ne peut déduire fiscalement une provision pour créance douteuse lorsque le montant de l'avance est manifestement hors de
proportion avec la solvabilité de la société emprunteuse. Une telle avance relève effectivement d'une gestion anormale. Il est
indifférent qu'elle soit assortie du versement d'intérêts. Voir Conseil d'État 22 janvier 2010, 8e et 3e sous-sections, nº 313868,

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