Cours - Droit fiscal des affaires - 4e - 332

DROIT FISCAL DES AFFAIRES

satisfaction alors même que l'administration ne rapporte pas d'éléments de preuve du
désinvestissement des sommes de la société civile, que toutes les sociétés ont une activité
réelle, c'est-à-dire ne sont pas des sociétés fictives, et qu'il n'est constaté aucun désordre
dans les comptes sociaux. On devrait alors retenir la personnalité juridique de la société
pour conclure à l'absence de distribution officieuse.
L'analyse de la jurisprudence du Conseil d'État fait apparaître que ce dernier ne retient le
critère de la maîtrise d'affaire que lorsque les associés sont passés outre la personnalité
juridique de la société qui est alors bien interposée. De façon générale, il ressort des décisions du juge de l'impôt que l'interposition est retenue quand la fraude est clairement
établie, parce que l'on est en présence de recettes volontairement dissimulées, d'une
confusion manifeste entre les comptes du contribuable et ceux de la société, d'une totale
violation des règles du droit des sociétés et d'une négation de la personnalité de la société
qui n'est alors que de façade. Les éléments d'appréciation ne sont pas forcément cumulatifs, même si bien souvent plusieurs d'entre eux sont remplis lorsque le juge écarte la
personnalité juridique de la société en la considérant comme interposée. Par ailleurs,
dans tous les cas le juge retient qu'il était manifeste que le dirigeant disposait seul
et sans aucun contrôle des fonds sociaux, en fait. La présomption de distribution ne joue
que si un seul maître de l'affaire est identifié448. En soi, la structure du capital n'est pas
un élément suffisant, contrairement à ce qui apparaît à tort comme le fondement de
certaines décisions de juges du fond. Aussi doit-on se féliciter que le Conseil d'État ait
fait un rappel à l'ordre sur ce point en 2011, en soulignant que le critère de la détention
des parts sociales ne permet pas à lui seul de caractériser la maîtrise de l'affaire449.
Comme le note M. le rapporteur public Olléon, « à partir du moment où le contribuable
conteste les redressements, il appartient à l'administration (...), d'apporter la preuve que
le contribuable était le maître de l'affaire. Elle doit donc mettre dans la balance suffisamment d'éléments pour établir que le contribuable est le maître de l'affaire, c'est-à-dire le
seul maître de l'affaire. Il est légitime d'exiger, dans ces conditions, que l'administration
soutienne que le contribuable est le seul à exercer certaines prérogatives essentielles de
la vie de la société. C'est ensuite au contribuable, dans le cadre de la dialectique de la
preuve, de combattre cette argumentation »450.

2. Les distributions non prélevées sur les bénéfices et les bénéfices désinvestis
351 La doctrine parle parfois de distributions camouflées pour qualifier ces deux hypothèses qui sont visées par l'article 109-1 du Code général des impôts451. Sont considérés

448. Conseil d'État, 22 février 2017, plénière, nº 388887, min. c. C., RJF 2017, nº 5, comm. nº 431.
449. Conseil d'État 30 décembre 2011, 8e et 3e sous-sections, nº 332088, min c. M. Le Goff, Droit fiscal 2012, nº 16, comm. nº 263,
conclusions L. OLLÉON. Dans le même sens, Conseil d'État 10 décembre 2010, 10e et 9e sous-sections, nº 308189, Meyneng,
RJF 2011, nº 3, comm. nº 269 (« en se bornant à relever que M. Meyneng était président-directeur général de la SA Frangeul
Diffusion et détenait avec son épouse 34 % du capital de la société, pour en déduire qu'il avait participé de façon déterminante à
la décision d'inscription des sommes en cause en charges à payer et devait être regardé en conséquence comme en ayant eu la
disposition dès cette inscription, sans rechercher si cette participation lui permettait, compte tenu notamment de la répartition
du reste du capital de la société, de déterminer en fait les décisions de la société, la cour administrative d'appel de Paris a
commis une erreur de droit »).
450. L. OLLÉON, conclusions sur Conseil d'État 30 décembre 2011, 8e et 3e sous-sections, nº 332088, min c. M. Le Goff, Droit
fiscal 2012, nº 16, comm. nº 263, p. 29.
451. Il faut compléter ces dispositions par celle de l'article 110 du Code général des impôts et par certaines dispositions de
l'article 111 du Code général des impôts.

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