Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 1 - 126

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MÉTHODE D'INTERPRÉTATION ET SOURCES EN DROIT PRIVÉ POSITIF

quotes idéales entre individus, et ne peut être que cela, - idée admise a priori,
sans être recommandée ni par la vraie tradition historique, ni par la loi, ni par
l'intention des parties, ni assurément par la préoccupation de fournir un point
d'appui efficace à la pratique. - Vous dégagez, par cela seul, l'énigme autrement
insoluble. Et il ne reste plus qu'à chercher, en pleine liberté, une mise en œuvre
juridique de la notion élémentaire de patrimoine, qui concilie la volonté légitime
des membres de la société avec les intérêts des tiers, sous le point de vue supérieur
de l'intérêt général. Quant à la conception qui puisse expliquer tout cela, vous ne
pouvez la découvrir que par tâtonnements ; et vous ne devez y voir autre chose
qu'une approximation hypothétique, essentiellement susceptible de changements,
puisqu'elle manque de toute réalité objective.
71. J'ai appuyé à dessein sur cet exemple, parce qu'il nous laisse entrevoir,
relativement à une théorie importante, et suffisamment étudiée déjà pour que j'aie
pu me borner à de simples références, l'interprétation moderne s'accusant ellemême en quelque sorte, et poussée, par la force des besoins juridiques, à rompre
en visière à sa propre méthode. J'en veux rapprocher, maintenant, avec moins de
développements, une autre question, d'un caractère bien plus spécial, où la même
étroitesse de vues s'est rencontrée, de la part des meilleurs interprètes, et engendrera bientôt, j'y compte, des résultats analogues.
Ou sait que l'inaliénabililé de la dot, sous le régime dotal, admise par le Code
Napoléon, tout au moins pour les immeubles dotaux, est réglée dans notre loi
d'une façon fort sommaire (art. 1554-1561 C. civ. franç.). À s'en tenir aux textes,
bien des questions restent incertaines, relativement surtout aux effets de ce statut
exorbitant, et à la sanction de ses violations, particulièrement pour le cas d'une
aliénation, à laquelle la femme ait coopéré. - Or, on a pensé que, pour faciliter la
solution de ces difficultés de détail, il serait précieux, qu'il était même nécessaire,
avant tout, d'être fixé sur le caractère juridique du vice tenant à l'inaliénabilité
dotale. On a donc recherché à quelle idée fondamentale se pouvait rattacher cette
institution originale. Et l'on n'a trouvé que deux conceptions admissibles. Pour les
uns, l'inaliénabilité dotale apparaîtrait comme une incapacité exceptionnelle,
atteignant la personne même de la femme89. Pour les autres, ce serait une indisponibilité réelle, frappant les biens plutôt que la personne90. Bien que l'on ne fût pas
absolument d'accord sur les conséquences à tirer de chacun de ces points de vue,
l'un ou l'autre a paru devoir être adopté, avant toute discussion, par les auteurs
qui ont approfondi cette matière. - Il résulte manifestement de cette manière de
faire, que l'interprète, qui a pris parti sur cette question générale, voit son indépendance d'opinion singulièrement compromise, lorsqu'il arrive aux détails du
sujet. Il en résulte, aussi, que l'interprétation, dans son ensemble, manque
89. J. E. Labbé, Régime dotal, Obligations de la femme, Exécution, dans : Revue critique de législ.
et de jurispr., 1856-i°, t. IX, p. 1-18. - P. Gide. Condition privée de la femme, liv. 4. chap. III, § 4 ;
2e éd., Paris, Larose, 1885, p. 447-456. - Colmet de Santerre, Cours analytique de Code civil, t. VI,
n° 232 bis I. - Baudry-Lacantinerie, Précis de Droit civil, 6e éd., t. III, 1898, n° 384. - P. Deloynes,
dans : Revue critique de législ. et de jurispr., 1882, p. 541-577. - Guillouard, Traité du contrat de
mariage, nos 1836-1841, 2e éd., t. IV. p. 162-168. - Cpr. Valette, dans : Mélanges de Droit, 1880,
p. 520-521, et Ch. Lyon-Caen, note dans Sir., 76, 2, 65.
90. C. Demolombe, Constitution de dot, Biens à venir, dans : Revue de législation et de jurisprudence (Wolowski), 1835, t. II, p. 282-296. - Troplong, Contrat de mariage, nos 3269, 3312, 3317,
t. IV, 1850, p. 356, 357, 406, 414. - M. Mongin, Du caractère de l'inaliénabilité dotale, dans : Revue
critique de législ. et de jurispr., 1886, p. 92-112, et p. 170-190. - Cpr. Aubry et Rau, § 538, note 31,
t. V, 4e éd., p. 614.
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