Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 2 - 103

LA LIBRE RECHERCHE SCIENTIFIQuE

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ne se dégage pas seulement, aujourd'hui, comme l'expression d'une condition d'équilibre, reconnue nécessaire, de toute notre organisation sociale. On peut dire, qu'il est
implicitement contenu dans certaines dispositions de notre droit public écrit, dont la
plus générale est peut-être l'article 4 de la Déclaration des droits de 1789264.
En tout cas, les rédacteurs du Code civil en ont pleinement reconnu et consacré
l'application la plus concrète, la moins discutable aussi assurément, quand ils ont
proclamé et sanctionné la liberté des conventions privées (voy. notamment : art. 537,
al. 1, art. 1134, art. 1156 et sq. C. civ. franç.)265, plus généralement même peut-on
dire, la liberté des actes juridiques, que le législateur était amené à organiser266.
Tout ceci paraîtra, sans doute, universellement admis aujourd'hui. J'en
conviens. Mais, quand il s'agit de mettre en œuvre le principe dans son entier, et
d'en développer tout le contenu, pour lui faire pénétrer, jusqu'à la moelle, notre
vie pratique, en le conciliant seulement avec le besoin de certitude, essentiel à
celle-ci, notre interprétation sait-elle toujours comprendre et manier, avec une
latitude et une souplesse suffisantes, les éléments psychologiques et sociaux, qui
devraient animer la formule de l'autonomie et en faire rayonner l'action ? Ne
peut-on pas pressentir que, sous l'influence d'une recherche plus libre, cette formule serait capable, à l'heure actuelle, d'une nouvelle et plus pleine fécondité267 ?
Notamment, et en envisageant, d'abord, le contenu des actes juridiques, valablement consentis, et incontestablement reconnus par la loi, - disons, si l'on veut,
des contrats, - tout en érigeant en principe la puissance de la volonté qui les
forme, ne restons-nous pas trop souvent fidèles au souvenir, et dociles aux conséquences, des catégories romaines, qui dominent encore, il faut bien le dire, l'ensemble de notre législation écrite, en ces matières ? Pourtant, si ces catégories
peuvent légitimement encore éclairer l'interprétation des volontés qu'elles synthétisent, il ne faudrait pas oublier, que les dispositions légales, qui les consacrent, ne
valent aujourd'hui que comme des compléments de volonté268 ; qu'elles ne sont
264. « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui... ». Sur la portée de ce
texte, voy. Ch. Brudant, Le Droit individuel et l'État, 1891, nos 87-93, p. 138-150. - Cours de droit civil
français. Introduction, 1896, p. 8, p. 22. - Pour comprendre, comment ce principe général de liberté
emporte caractère obligatoire des engagements civils volontaires, il suffit de se reporter au projet de
déclaration des droits de l'homme, de Sieyès, lu, les 20 et 21 juillet 1789, au Comité de Constitution ;
dans Archives parlementaires, 1re série, t. VIII, p. 258, col. 1. Voyez la rubrique : Rapports des engagements avec la liberté.
265. Voy., de plus, Portalis, Discours préliminaire sur le Projet, Fenet, t. I, p. 509-510. - Jaubbrt,
Discours au Corps législatif sur la loi du 30 ventôse an XII, Locré, t. I, p. 359.
266. « Denn das Rechtsgeschäft ist allgemein das Instrument der privatrechtlichen Selbstbestimmung. » H. Dernberg, Pandekten, § 91, t. I5, 1896, p. 215. [- Adde : E. Gounot, Le principe de l'autonomie de la volonté en droit privé, Contribution à l'étude critique de l'individualisme juridique ; thèse
de doct.  Droit, Dijon, 1911-1912. - E.  R. Bierling, Juristische Prizipienlehre, t.  IV, Tübingen,
J. C. B. Mohr, 1911, p. 422-426 (§ 57, n° 10), considère l'autonomie privée comme un moyen d'analogie. - Sur l'autonomie de la volonté, dans le Code civil allemand de 1896, cons. R. Saleilles, Introduction à l'étude du droit civil allemand, Paris, F. Pichon, 1904. p. 43-53 (§ VI)].
267. Il est intéressant d'observer, que le législateur contemporain s'est parfois servi de l'autonomie de la volonté, pour étendre (par voie d'adoption facultative) l'application de dispositions restrictives de la liberté du droit commun. Ex. : loi du 18 juillet 1907, ayant pour objet la faculté d'adhésion
à la législation des accidents du travail ; loi du 21  avril 1906, organisant la protection des sites et
monuments naturels de caractère artistique].
268. Je ne dis pas, comme on le fait souvent, des présomptions de volonté. Car, si, parmi les
dispositions légales, dont il s'agit, il en est, qui peuvent être rattachées à l'interprétation probable de la
volonté des parties, d'autres n'ont ancunement ce caractère, et sont l'œuvre propre du législateur,
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