Anthologie du droit - Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Tome 2 - 32

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MÉTHODE D'INTERPRÉTATION ET SOURCES EN DROIT PRIVÉ POSITIF

Or, c'est de cette conclusion seule, formant une idée, assez nouvelle chez nous, que
nous avons, pour l'instant, à nous rendre compte.
Elle ne paraît guère avoir été vraiment dégagée, même sous la forme un peu
embarrassée qui vient d'être décrite, que depuis un petit nombre d'années84.
Dès 1892, je rencontre, sous la plume d'E. Bartin, dans la préface de ses
Études sur le Régime dotal, à la suite et en manière de conclusion de certains développements touchant la codification, que j'ai déjà signalés (ci-dessus, n° 5, t. I,
p. 13, note 3), la formule, suffisamment nette, que je transcris ici : « Il est donc
faux que la codification arrête l'évolution du droit... L'évolution du droit est un
phénomène universel, dont les conditions et le caractère varient seulement, suivant qu'elle se produit sous un régime de codification ou en dehors de la codification. Dans l'un et l'autre cas, on peut dire, et on a dit avec raison, que le juge ne
borne pas son rôle à celui d'un pur interprète : il participe » réellement « à la
confection de la loi civile. Dans ces conditions, il y a une histoire possible de la
jurisprudence et des institutions qu'elle fait mouvoir »85.
un peu plus tard, Ed. Lambert, dans l'Introduction de sa thèse, si remarquée, sur le Contrat en faveur de tiers, nous présentait la jurisprudence moderne,
comme organe direct et suffisant d'un droit coutumier contemporain, capable d'engendrer ou de ranimer, dans le silence ou l'obscurité de la loi écrite, de véritables
institutions juridiques86.
L'expression, douée d'un sens très clair, grâce surtout aux développements
de l'auteur, parait avoir fait fortune. Car, je la retrouve dans le compte rendu d'un
livre récent [en 1899] publié parle journal la Loi87, et dont je veux citer cette phrase
significative : « Nous avons particulièrement remarqué l'importance qu'ils (les
auteurs du livre dont on rend compte) attachent à la jurisprudence, cette clinique
du droit, dont l'étude s'impose davantage, à mesure que nous nous éloignons de
l'époque de la rédaction du Code civil, et qu'en présence des questions nouvelles,
juger la jurisprudence, usant de large appréciation, pour compléter ou corriger la loi in concreto. An
fond, ce n'est que dans les applications concrètes, que se réalise, pour lui, l'interprétation prétorienne
des tribunaux (voy. notamment sa Conclusion, p. 201-220). [- La distinction nécessaire se trouve, au
contraire, nettement faite par : A. Rol, Les causes et les effets du divorce (alias : L'évolution du divorce) ;
thèse de doct. Droit. Aix-Marseille, 1904-1905. Introduction. Du rôle prétorien de la jurisprudence,
p. 9-62, qui conclut en faveur de larges pouvoirs d'interprétation, à reconnaître aux tribunaux, mais
contre l'idée d'attribuer force obligatoire à la jurisprudence acquise.]
84. [Il faut, en effet, laisser à part les études, d'ailleurs intéressantes, où se trouvent vantés les
mérites de la jurisprudence, sans qu'on ait prétendu attribuer à celle-ci une valeur impérative quelconque : telles, les préfaces célèbres de Ledru-Rollin à la 3e édition du Journal du Palais refondu depuis
1791 (t. I, 1791 - an VIII, paru en 1837). Coup d'œil sur les praticiens, les arrêtistes et la jurisprudence, p. IX-XIX ; et de Devilleneuve à la collection nouvelle du Recueil de Sirey refondu de 1791
à 1830 (t. I, 1791-an XII, paru en 1840, p. VI). - Adde : Dalloz, Répertoire alphabétique, t. II (1845).
Idée générale de cette nouvelle édition, p. IX-XV. - On pourrait, plutôt, entrevoir, comme un pressentiment du mouvement actuel, dans L. Cabantous, Introduction à un cours de jurisprudence, dans
Revue de législation et de jurisprudence (Wolowski) 1843-1°, t. XVII, p. 446-462. Mais, en réalité, cet
auteur refuse nettement force de loi à la jurisprudence, sauf si elle est antérieure à 1790. Voy., notamment, p. 456-457, p. 459 et 460. - Adde encore : Sacaze, Jurisprudence du XIXe siècle, dans Revue critique de législ. et de jurispr., 1885, t. VI, p. 83-88 ; - et la réponse d'Ancelot, Quelques réflexions sur
la doctrine et la jurisprudence comparées, ibid., 1855, t. VII, p. 191-198.]
85. F. Bartin, Études sur le régime dotal, 1892. Préface, p. IV-V.
86. Ed. Lambert, Du contrat en faveur de tiers, 1893. Introduction, p. VII-X.
87. Compte rendu, signé L. B. du Traité des obligations, de Hudelot et Metman : La Loi, du
jeudi 20 mai 1897, p. 455. - Les mots, soulignés au texte comme décisifs, l'ont été par moi.
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