Contextes - Penser l'ordre juridique médiéval et moderne - 158

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LA NORMATIvITÉ

Meaux. Ce modèle de procédure supposait une longue concertation et était
suivi dans le détail, si bien que la question demeure posée du sort qui était
celui d'éventuels articles non accordés9. Cette pratique de révision de textes
coutumiers, pour suivre l'évolution des usages, s'est prolongée jusqu'à la
fin du xviiie siècle. Ainsi, en dehors de l'intervention royale au xve siècle
concernant de grandes coutumes régionales, y avait-il un autre mouvement
de rédaction de coutumes très large et déjà fort ancien.
Enfin, le fait même de l'intervention de juristes pour la rédaction comme
pour la révision de la coutume ne pouvait rester sans conséquence sur
la nature du fait coutumier lui-même. Cela est bien connu pour ce qui
concerne les coutumes méridionales. Dans les pays de droit écrit, particulièrement en Languedoc où les consulats urbains étaient tenus surtout par des
commerçants et artisans qui en assuraient le gouvernement, ceux-ci savaient
s'entourer de conseillers juristes, avocats et notaires, soumis d'ailleurs par
la coutume à des conditions de recrutement très rigoureuses sur le plan
moral comme sur celui des qualifications en matière juridique, c'est-à-dire
être diplomé en droit. Si ces juristes ne participaient pas formellement aux
délibérations, ils en consignaient les décisions et en tant que spécialistes de
la coutume leur présence était importante10.
Or, d'une manière générale, l'intervention des juristes dès lors qu'ils
avaient été formés par l'enseignement universitaire, apportait avec eux dans
le domaine coutumier l'influence des droits savants, particulièrement du
droit romain. Leur mode de pensée se retrouvait d'ailleurs aussi bien dans la
vie judiciaire, dans ce qu'il pouvait apporter d'interprétation en même temps
qu'il reconnaissait la coutume en tant que source de droit. Cela se retrouve
également dans les pays de coutumes. Ainsi la pratique des justices seigneuriales du Maine et de l'Anjou révèle que les juges, présidents de séances, pour
la plupart gradués en droit, ajoutaient à la connaissance du droit coutumier
la formation au droit romain. De plus, ils entretenaient d'étroites relations
avec les juridictions royales voisines11. De même a-t-on souligné la position
au xviie siècle des avocats généraux au parlement de Metz par rapport à la
coutume dans la mesure où leurs plaidoiries paraissent en général annoncer
l'orientation des arrêts d'autant que ces derniers n'étaient pas motivés. Ces
magistrats veillaient à la bonne application de la coutume, dont ils éclairaient
les dispositions en justifiant leur interprétation12.
9. A. Durieux, « Comment ont été rédigées et publiées les Coutumes générales du
Bailliage de Meaux (3-5 octobre 1509) », in ibid., p. 101-126.
10. M. Lesné-Ferret, « Le ''parfait juriste'' dans les coutumes des pays de droit écrit,
au xiiie siècle », in ibid., p. 45-68.
11. I. Mathieu, « La coutume vue à travers les archives de la pratique judiciaire : le cas des
tribunaux seigneuriaux de l'Anjou et du Maine (xive-milieu xvie siècles) », in ibid., p. 69-89.
12. F. Roemer, « Avocat général et coutumes », in ibid., p. 141-169.

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