Systèmes - Lobbying et stratégies d'influences en France - 1re - 31

Le champ d'émergence économique et institutionnel

Art. 4 « Si contre les principes de la liberté et de la constitution, des citoyens
attachés aux mêmes professions, arts et métiers, prenaient des délibérations ou
faisaient entre eux des conventions tendant à n'accorder qu'à un prix déterminé le
secours de leur industrie ou de leurs travaux, lesdites délibérations et conventions
accompagnées ou non du serment, sont déclarées inconstitutionnelles,
attentatoires à la liberté et à la déclaration des droits de l'homme et de nul
effet ; les corps administratifs et municipaux seront tenus de les déclarer telles.
Les auteurs, chefs et instigateurs, qui les auront provoquées, rédigées ou
présidées, seront cités devant le tribunal de police à la requête du procureur de
la commune, condamnés chacun en cinq cents livres d'amende et suspendus
pendant un an de l'exercice de tous droits de citoyen actif, et de l'entrée dans
toutes les assemblées primaires ». [...].

Comme l'État est le seul porteur légitime de l'intérêt général,
toute organisation particulière qui prétendrait intervenir dans sa
définition est suspectée d'usurpation. Le décret d'Allarde (2 et
17 mars 1791) en tire les conclusions en créant le délit de coalition
pour réprimer la représentation d'intérêts collectifs. N'admettant
pas que les individus puissent se regrouper pour défendre leurs
intérêts, ces dispositions interdisent toute forme d'organisation
permanente, toute entente passagère soit entre les producteurs
pour améliorer leur production, soit entre les ouvriers pour
améliorer leur condition de travail.
Dans ce paysage idéologique hostile aux intérêts particuliers et à
leur organisation, la liberté d'association qui peut, au surplus, dans
l'esprit de ses adversaires, favoriser la désagrégation de l'État57, va
être progressivement si encadrée qu'elle en devient insignifiante. Il
n'est pas jusqu'aux sociétés savantes qui aient été pour la plupart
supprimées sous la Révolution58. Plus encore que les dangers que
les associations font peser sur l'ordre représentatif, c'est le danger
que constitue toute forme d'« auto-organisation des citoyens »59
pour l'ordre public qui conduit les régimes successifs à en réduire la
portée60. Pour être tolérées, les associations, doivent, surtout si leur
objet est politique, s'en tenir à une organisation rudimentaire, ne
57. P. POMBENI, Introduction à l'histoire des partis politiques, PUF, 1992, p. 86.
58. D. LEJEUNE, « Paradoxe des sociétés savantes : "bonnes filles" ou groupes de pression ? »,
in J. GARRIGUES (dir.), Les groupes..., op. cit., p. 37.
59. R. HUARD, « Aux origines des cultures d'organisation en France : les premières
incarnations du "parti politique" au XIXe siècle », in D. CEFAÏ (dir.), Cultures politiques, PUF,
2001, p. 216.
60. La Constitution de l'an III dispose en ce sens que « ne peut être formé de corporations ni
d'associations contraires à l'ordre public » (art. 360). L'article 361 ajoute qu'« aucune
assemblée de citoyens ne peut se qualifier de société populaire ». Le décret sur les
sociétés populaires (16 oct. 1794) prohibait déjà toutes affiliations, agrégations,
fédérations et toute correspondance en nom collectif entre sociétés sous quelque
dénomination qu'elles existent. La loi du 23 août 1795 supprime définitivement les
sociétés dites populaires.

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