Systèmes - Lobbying et stratégies d'influences en France - 1re - 57

Le champ d'émergence économique et institutionnel

et à « des préoccupations électorales »209. Bien qu'interdits par le
règlement de l'Assemblée sous la IVe République, ils ont poursuivi
leurs activités « sous couvert d'amicales ou de commissions
d'études »210. À l'Assemblée nationale, les commissions parlementaires
permanentes ont reçu, entre autres missions, celle d'assurer son
information afin de lui permettre d'exercer son contrôle sur la politique
du gouvernement211. À cette fin, elles peuvent auditionner les ministres
et convoquer les personnes de leur choix afin de les entendre212, tout
comme les commissions d'enquête parlementaires. Les besoins
d'information et d'expertise, la nécessité d'apprécier l'acceptabilité des
politiques envisagées par les acteurs concernés, l'impératif de connaître
et de canaliser les demandes des acteurs du secteur d'intervention,
étant communs à la plupart des institutions politico-administratives,
des instances de consultation n'ont pas seulement été institutionnalisées
dans les appareils centraux de l'État, mais aussi dans ses structures
déconcentrées et dans ses administrations décentralisées213 où les
intérêts locaux se font entendre214. À travers les nombreuses
procédures formelles et informelles215 de concertation et de négociation,

209. JOSEPH-BARTHÉLEMY, P. DUEZ, op. cit., p. 536-537. La liste est impressionnante : groupes de
l'éducation nationale, de la défense des contribuables, de l'élevage, des planteurs de
tabac, des matériaux extraits du sol français, des commis voyageurs, des concierges,
des députés, des maires des anciens combattants, des familles nombreuses, de l'art
musical, de l'art cinématographique... Deux groupes sont selon eux spécialement
actifs : le groupe de la défense paysanne et le groupe viticole. Ceux qui sont « formés
pour confirmer les prétentions d'une catégorie de parties prenantes au budget » sont
jugés « les plus redoutables » : défense des cantonniers, des commis des postes.
210. Y. MÉNY, op. cit., p. 126.
211. Règlement de l'Assemblée nationale, art. 145.
212. Loi du 14 juin 1996, qui prévoit une exception pour les sujets de caractère secret (défense
nationale, affaires étrangères, sécurité intérieure) et le respect de la séparation des
pouvoirs.
213. Chaque Région comprend ainsi, auprès du Conseil régional, un Conseil économique,
social et environnemental régional qui permet d'associer les représentants des acteurs
socio-professionnels aux décisions, qui s'inscrit dans la droite ligne des Comités
d'expansion économiques créés en 1954, devenus Comité d'expansion régionale et
d'aménagement en 1960, puis Commission de développement économique régional
(CODER) en 1964 : P. BODINEAU, Les conseils économiques et sociaux, PUF, 1994.
214. H. PORTELLI, « Les lobbies au niveau local », Pouvoirs, nº 79,1996. Il les classe en lobbies
économiques et financiers, lobbies associatifs et les lobbies d'aide à la décision.
215. Pour un exemple de consultation d'associations par l'administration en matière fiscale :
M.-C. PETIT, A. CHOUC, J. GAZZANO, Mission d'enquête. La contribution additionnelle à l'impôt
sur les sociétés de 3 % sur les revenus distribués, Inspection générale des finances,
novembre 2017, p. 12. Les auteurs suggèrent (p. 43) d'améliorer la concertation en
matière fiscale pour éviter à l'avenir les conséquences désastreuses de l'adoption de
règles fiscales illégales. Bien qu'il cherche à minimiser la responsabilité des « experts »
de l'administration fiscale, le rapport montre parfaitement leur aveuglement face aux
avertissements de la doctrine (« La contribution de 3 % sur les montants distribués et le
régime des sociétés mère et filiales : de Charybde en Scylla », Ph. DEROUIN, Revue de droit
fiscal, octobre 2012).

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