Cours - Droit commercial - 3e - 29

Introduction

souverainement l'existence des usages ainsi que leur application, et la Cour de cassation
n'exerce aucun contrôle sur cette appréciation. Il a été admis néanmoins que la Cour de
cassation contrôle l'opposabilité des usages aux contractants.
La nature contractuelle de l'usage influence son opposabilité tant à l'égard des
personnes concernées que de la loi. L'opposabilité est délimitée par des critères professionnel et géographique. L'usage conventionnel est opposable aux professionnels travaillant dans le même secteur d'activité et dans la même localité ou région. En revanche,
l'usage conventionnel qui n'a pas été accepté expressément est inopposable aux professionnels relevant d'un autre secteur d'activité ou d'une autre localité. Ces professionnels
auxquels les usages sont opposables peuvent choisir de les écarter par convention. En
effet, les usages conventionnels ont un caractère supplétif et les parties peuvent manifester leur opposition à leur application. Dans ce cas, l'usage ne s'applique pas. Enfin,
l'usage conventionnel n'est pas opposable aux non-commerçants ; ces derniers ne
peuvent pas avoir connaissance des usages qui ne leur sont donc pas opposables.
La question de la valeur juridique des usages est également posée et consiste à déterminer quelle est la force de l'usage au regard de la loi. Un usage conventionnel ne peut
déroger à une loi supplétive, et donc a fortiori à une loi impérative. D'importantes différences existent entre l'usage conventionnel et l'usage de droit.

2. Les usages de droit
Notion. - Qualifiés parfois de coutumes, les usages de droit se forment de la même
manière que les usages conventionnels. Nés d'une pratique répétée à l'occasion de la
formation ou de l'exécution d'un contrat, les usages de droit sont engendrés par une
certaine répétition qui permet d'en dégager l'existence. La différence par rapport aux
usages conventionnels tient au fait que l'usage a été consacré par une décision de justice.
Cette consécration jurisprudentielle conduit à lui reconnaître la valeur d'une véritable règle
de droit. L'usage de droit devient alors une règle juridique autonome dont la force est détachée de la volonté des parties. Il en résulte une force contraignante plus importante :
l'usage de droit est obligatoire. Par l'exigence supplémentaire d'une consécration par les
tribunaux, les exemples d'usages de droit sont moins nombreux que les usages conventionnels. Parmi les usages de droit figure l'usage selon lequel la solidarité se présume en
matière commerciale37. Il s'agit de la solidarité passive qui conduit les débiteurs d'une
même dette à être tenus solidairement du remboursement de leur dette. La force de
l'usage de droit diffère selon les catégories de ces usages. Ainsi, l'usage de droit peut être
contraire à la loi et édicter une pratique contraire à une disposition légale. On parle alors
d'usage contra legem. C'est le cas de la solidarité passive dont la règle est contraire à
l'article 1310 du Code civil qui prévoit que la solidarité doit être expressément stipulée.
C'est également le cas de l'anatocisme des comptes bancaires38, puisque la capitalisation
des intérêts de moins d'un an est contraire à l'article 1343-2 du Code civil. Par ailleurs,
l'usage de droit peut s'appliquer en vertu d'un renvoi exprès de la loi. On parle alors
d'usage secundum legem. Enfin, l'usage de droit peut s'appliquer dans le silence de la loi :
on parle d'usage praeter legem. Alors qu'il n'existe aucun texte, l'exigence d'usages loyaux
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37. V. infra, nº 127.
38. V. infra, nº 141.

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