Contextes - Penser la technique juridique - 160

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LEX MERCATORIA et teChNIqueS JurIDIqueS

particulier du commerce international, celui de la vente des soies, il mettra
en lumière un droit unifié de la vente ; droit jouissant d'un mécanisme alternatif de règlement des différends, l'arbitrage, dont l'autonomie a permis
l'essor de la Lex mercatoria moderne. en cela, il peut être considéré comme
un juriste positiviste de la Lex mercatoria.
11. La thèse de Masaichiro Ishizaki traduit le passage d'une Lex mercatoria médiévale à une Lex Mercatoria moderne et, incidemment, une
mobilisation de la technique juridique au service d'une nouvelle approche
du droit du commerce international.
12. À la différence du droit marchand de la vente internationale des
soies de la fin du xixe siècle et du début du xxe siècle, la Lex mercatoria
médiévale n'a pas revêtu le caractère « d'un mouvement spontané » mais
a été, tout au contraire, « imposée par les autorités publiques locales, donc
à partir du xe siècle par les seigneurs les plus puissants qui seuls pouvaient
chercher à assurer une certaine sécurité aux commerçants », écrit le professeur Jean Bart13. Or, Ishizaki met en exergue, tout au contraire, un véritable
droit spontané de la vente des soies, affranchi de l'emprise des autorités
publiques. Mais l'intérêt de cette thèse est qu'elle constitue une défense
du pluralisme juridique tout autant qu'elle révèle l'existence d'usages du
commerce international à même de combler les lacunes des droits nationaux
et du droit international privé.
13. Ce faisant, le Moyen Âge, tout autant que la société de nos jours,
n'échappent pas à la problématique du pluralisme juridique tel que développé par Santi romano (1875-1947) dans son œuvre magistrale ayant
pour titre L'ordre juridique14. Même si l'œuvre, parue en 1918, en langue
italienne, sous le titre L'Ordinamento Giuridico, n'est pas connue d'Ishizaki au moment où ce dernier rédige sa thèse, elle en constitue un support
théorique par la vision de l'institutionnalisme juridique du droit qu'elle
défend - avec Maurice hauriou, un des piliers de la doctrine française -.
Or, définissant « l'institution (comme) tout être ou corps social »15, Santi
romano écrit qu'il y a « autant d'ordres juridiques que d'institutions »16.
13. « La lex mercatoria au Moyen Âge : mythe ou réalité ? », in Souveraineté étatique et
marchés internationaux à la fin du xxe siècle. À propos de 30 ans de recherche du CREDIMI,
Mélanges en l'honneur de Philippe Kahn, Litec, 2000, p. 9-22, spéc. p. 18.
14. S. romano, L'ordre juridique, Dalloz, 1975, p. 77-159, spéc. p. 79-82, traduction
de l'œuvre originale en italien L'Ordinamento Giuridico (1918) ; F. Ost et M. Van de
kerchove, Jalons pour une théorie critique du droit, Bruxelles, Publications des Facultés
universitaires St Louis, 1987, p. 244-245 ; F. rigaux, Introduction à la science du droit,
Bruxelles, éd. Vie Ouvrière, 1974, p. 364 ; « Le droit au singulier et au pluriel », Rev. int.
étud. jur. 1982, n° 9, p. 51 ; M.-F. rigaux, La théorie des limites matérielles à l'exercice de
la fonction constituante, Bruxelles, Larcier, 1985, p. 270.
15. S. romano, L'ordre juridique, op. cit., p. 79-82.
16. Ibid., p. 77.
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