Contextes - Penser la technique juridique - 168

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LEX MERCATORIA et teChNIqueS JurIDIqueS

à régir les rapports qui naissent en son sein45. Cette approche constitue un
refus net de réduire une institution à des normes. L'ordre juridique ne se
réduit en effet nullement aux éléments qui le composent, et ce, parce qu'il
est « impossible de tenir le droit pour autre chose qu'une institution »,
écrit Santi romano. « Le droit est ; la norme peut naître. Ce n'est donc pas
celle-ci qui, en premier lieu, établit le droit ; elle n'en est qu'une manifestation plus tardive, subsidiaire », poursuit-il46. C'est donc l'institution qui,
de manière discrétionnaire, pose la norme (ou non) en prévoyant, le cas
échéant, les formes et les procédures selon lesquelles elle peut être virtuellement édictée. C'est dans ce cadre théorique que s'inscrit la Lex mercatoria.
35. Il suffit d'observer qu'après avoir défini l'institution comme « un
être ou un corps social en ce sens qu'elle est une manifestation de la nature
sociale et non purement individuelle de l'homme », Santi romano estime,
en effet, qu'elle est la preuve tangible de l'existence d'un ordre juridique
donné47. toute institution est, en effet, « un ordre juridique, une sphère
existante, plus ou moins complète, de droit objectif »48. L'institution apparaît alors sous le jour d'une structure organisationnelle, ferment de l'unité
du corps social.
36. C'est en puisant ses sources dans la très grande richesse des normes
qu'émergera la Lex mercatoria, parmi lesquelles les instruments de droit
mou (codes de bonne conduite, chartes professionnelles, etc.). Leur juridicité contribue à en faire une source « formelle subjective » importante49.
L'objectif est en effet l'articulation de la Lex mercatoria avec les autres
normes internationales et ce à quoi la technique du pluralisme juridique
contribue.
37. Le recours à la légistique comparée en vue de l'élaboration d'un
droit des affaires uniforme rattaché à un ordre juridique anational met sans
doute en exergue le fait que les opérateurs économiques mondiaux sont
à même de contribuer à l'émergence d'une Lex mercatoria plus efficace
qu'une modélisation hâtive des systèmes juridiques.
45. h. kelsen, Théorie pure du droit, trad. C. eisenmann, Dalloz, 2e éd., 1962 ; S. romano,
L'ordre juridique, Dalloz, 1975 ; F. Osman, Les principes généraux de la Lex Mercatoria :
contribution à l'étude d'un ordre juridique anational, LGDJ, Bibliothèque de droit privé,
1991.
46. Ibid.
47. Ibid., p. 26.
48. Ibid., p. 30.
49. F. Osman, « Avis, directives, codes de bonne conduite, recommandations, déontologie,
éthique, etc. : réflexion sur la dégradation des sources privées du droit », RTD civ. n° 3 juill.sept. 1995, p. 509 et s. Adde F. Osman, « Propos introductif : la Soft Law : aux confins de la
morale et de la lex mercatoria », in Soft law et droit du commerce international. Contribution
à l'étude du renouvèlement des sources du droit du commerce international (dir. F. Osman,
M.-C. rigaud et h. Prince, LexisNexis France et Canada, 2018, à paraître).
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