Contextes - Le formalisme - 127

REGARDS CROISÉS SUR LE FORMALISME

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Cette souplesse - pour ne pas dire légèreté - au niveau du formalisme,
se retrouve de manière encore plus marquée au niveau des deux autres
sûretés personnelles que sont la lettre d'intention et les garanties autonomes.
Cela n'est pas étonnant dans la mesure où ces deux sûretés ne sont que la
consécration de mécanismes nés de la pratique commerciale et de la liberté
contractuelle. Il était hors de question de s'embarrasser de tout formalisme,
lequel serait d'ailleurs assez antinomique avec l'essence même de ces sûretés
et notamment de la lettre d'intention. S'agissant de celle-ci, le respect de l'article 1376 n'est même pas exigé s'agissant d'un simple engagement de faire.
En revanche, il sera exigé pour la garantie autonome, du moins conférée par
un non-commerçant, puisque celle-ci contient l'engagement du garant de
payer une certaine somme prédéterminée. Comme pour le cautionnement,
il s'agit alors d'une simple règle de preuve. Cette souplesse au niveau du
formalisme n'est nullement contestable dès lors que les garanties autonomes
sont utilisées dans leur milieu naturel, c'est-à-dire le commerce, et plus
précisément le commerce international. Elle devient plus problématique
lorsque ces mécanismes sont consentis par de simples particuliers, n'agissant
pas dans un contexte professionnel. La réforme du 23 mars 2006 n'a pas
entendu restreindre le champ d'utilisation de ces garanties autonomes, et
rien ne fait obstacle à leur utilisation en droit interne, sous réserve des deux
restrictions légales en matière de crédit à la consommation5 et de garanties
des loyers des baux d'habitation6. Doit-on alors admettre qu'existe à côté
du cautionnement aujourd'hui soumis à un formalisme exacerbé, une sûreté
encore plus dangereuse pour le garant, et qui ne serait soumis à aucun formalisme protecteur ? La réponse positive s'impose en application du principe
d'interprétation stricte des exceptions7. Pour l'instant, la question ne se
pose pas en pratique, les garanties autonomes n'étant guère utilisées hors
leur champ naturel... Mais, il est bien certain que si leur utilisation devait
se généraliser, et s'il s'avérait que les créanciers professionnels du crédit
succombent à la coupable tentation de se faire consentir de tels engagements
par des particuliers, la jurisprudence, voire le législateur, ne manquerait
pas d'opérer un alignement sur le régime protecteur de la caution profane.
S'agissant des sûretés réelles conventionnelles, il est remarquable de
relever que le gage, lui aussi, sous l'empire du Code civil de 1804, était
soumis à un régime relativement souple. Certes, l'article 2074 du Code
civil, tel qu'il existait avant la réforme du 23 mars 2006, exigeait un écrit dès
lors que la créance garantie ou l'objet engagé avait une valeur supérieure
à 5 000 francs, ce qui tendait à prouver que l'on était bien sur le terrain là
5. C. consom. art. L. 314-19.
6. Art. 22-1-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.
7. Albiges C. et Dumont-Lefrand M.-P., Droit des sûretés, 2016, Paris, Dalloz, coll.
Hypercours, n° 287, p. 212.

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