Contextes - Le formalisme - 139

LE FORMALISME DE TRANSCRIPTION

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11 brumaire an VII, dispose alors que, dans le cadre de la vente immobilière,
« la transcription (...) transmet à l'acquéreur les droits que le vendeur avait
à la propriété de l'immeuble »10.
Malgré la protection qu'il offre aux tiers, le transfert de la propriété
immobilière par transcription est rejeté par les rédacteurs du Code civil.
Influencés par la doctrine de l'École du droit naturel moderne11 faisant de
la volonté du propriétaire du consentement des parties le mode de transfert naturel de la propriété12, certains rédacteurs imposent le principe du
transfert consensuel13. En matière immobilière, le formalisme du transfert
est préservé, puisque seule la vente passée en la forme authentique est un
mode acquisitif de la propriété14. La discussion du projet de Code civil
voit alors les partisans du transfert consensuel de la propriété s'opposer
aux thuriféraires du système de transcription révolutionnaire15. Le débat
n'est finalement pas véritablement tranché et les dispositions du Code s'en
trouvent lacunaires16 : aucun formalisme n'est imposé en matière immobilière, alors que les partisans du transfert consensuel sont favorables à la
nécessaire authentification du contrat de vente. Surtout, le Code dispose

10. Loi du 11 brumaire an VII sur le régime hypothécaire, art. 28.
11. Sur l'influence du jusnaturalisme moderne sur les rédacteurs du Code civil de 1804,
voir : Arnaud A.-J., Les origines doctrinales du Code civil Français, 1969, Paris, LGDJ,
p. 180.
12. À partir du xviie siècle, les juristes hollandais et allemands de l'École du droit naturel
moderne remettent en cause le caractère nécessairement formaliste ou réaliste de l'acte
translatif de la propriété. Considérant que l'esprit l'emporte sur la matière, les jusnaturalistes
estiment que l'acquisition du dominium en droit naturel est ainsi pleinement réalisée par un
pacte, c'est-à-dire, par un simple échange de consentements : Grotius H., De jure belli ac
pacis, II, 8, n° 25 : « Atqui supra diximus ad dominii translationem naturaliter traditionem
non requiri », 1625, Parisiis, p. 243 ; von Pufendorf S., De jure naturæ et gentium, IV, 9,
n° 4 : « An non jure naturali ad translationem dominii requiratur traditio ? Nam id jam ab
aliis notatum, non recte traditionem referri inter modos adquirendi dominii, cum sit actus
in transferendo dominio interviens. Grotius, l. 2, c. 8, § 25 et alibi arbitratur, etiam solis
pactis jure naturali dominium possetransfert », 1672, Londini Scanorum, p. 528 ; Wolff C.,
Jus naturæ methodo scientifica pertractatum, III, 6, n° 988 : « Naturaliter jus in re aliena
constituitur pacto. Etenim naturaliter jus in re aliena statim acquiris, adeoque a domino
tibi in ea constituitur, quamptimum is sufficienter declarat, tibi jus hoc competere debere
et tu hoc acceptas (§ 987), consequenter vicissim declares te velle, ut hoc jus tibi competat
(§ 2) », t. III, 1743, Halæ Magdeburgicæ, p. 681.
13. Fenet P.-A., Recueil complet des travaux préparatoires du Code civil, t. II, 1836,
Paris, p. 164.
14. Fenet P.-A., Recueil complet, op. cit., t. II, p. 164-165.
15. Sur ce débat, voir : Borel J.-P., « La transcription hypothécaire des transferts conventionnels de propriété immobilière dans le code civil », RHD, t. 92, 2014, p. 589 et s.
16. De Loynes P., « Le code civil et le crédit régime hypothécaire, régime de la transmission de la propriété », in Le code civil 1804-1904. Livre du centenaire, 1904, Paris, Rousseau ;
réimpr. 2004, Paris, Dalloz, p. 387.
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