Contextes - Le formalisme - 259

RÉFLEXIONS SUR LE FORMALISME

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constitutionnel26. Cette jurisprudence est particulièrement importante. Elle
enseigne que le formalisme des droits fondamentaux peut venir perturber
l'application des règles classiques de conflits de lois dans le temps. En
effet, de simples dispositions transitoires de valeur législative ne sont pas
suffisantes pour différer l'application des droits fondamentaux. L'argument
semble imparable et explique que l'entrée en vigueur des nouvelles règles
de la garde à vue soit intervenue dans un tel climat d'insécurité.
Ensuite, ce mouvement en faveur des nullités s'est poursuivi pour
alimenter un contentieux désormais régulier destiné à sanctionner les différentes formalités imposées par les nouveaux droits du gardé à vue.
En pratique, le renforcement du formalisme de la garde à vue entraîne
une modification de la répartition du temps de la garde à vue. Auparavant
conçue comme un temps d'enquête à l'état pur, la garde à vue devient,
dorénavant, et de plus en plus, un temps administratif de notification et
de rédaction de procès-verbaux. Selon les estimations des enquêteurs, les
actes d'enquête « purs » (auditions, confrontations, perquisitions, transports
sur les lieux...) ne représentent en moyenne qu'un tiers du temps de la
garde à vue27. À terme, le formalisme croissant de la garde à vue pourrait
provoquer une mutation de la nature de la mesure pour en faire un simple
acte de défèrement à l'autorité judiciaire, sans investigation28.
Logiquement, depuis 2011, le contentieux de la nullité de la garde à vue
s'est considérablement accentué. Par exemple, et pour s'en tenir à l'année
écoulée, la nullité a été admise dans les cas suivants29 :
- en l'absence d'avis immédiat au procureur de la République, c'est-à-dire
dans l'heure qui suit le placement en garde à vue30 ;
26. Lequel avait décidé de reporter l'abrogation des dispositions antérieures du CPP au
1er juillet 2011 afin de laisser au législateur le temps d'adopter une réforme et d'éviter des
annulations massives. V. Cons. const., 30 juillet 2010, QPC n° 2010 - 14/22, M. Daniel W. et
autre et Cons. const., 22 septembre 2010, QPC n° 2010-31, M. Bulent A. et autres, précitées.
27. En ce sens, v. Druet D., « Le point de vue de l'officier de police judiciaire », in Les
droits fondamentaux du gardé à vue, op. cit., p. 20 et le rapport issu de la mission Beaume,
Rapport sur la procédure pénale, juillet 2014, p. 9 et s. Ce dernier conditionne l'acceptabilité de nouvelles avancées des droits de la défense lors de l'enquête policière à certaines
simplifications procédurales.
28. Comme un signe annonciateur, v. déjà CEDH, 27 juin 2013, Vassis c. France, Req.
n° 62736/09 qui énonce que « le délai de deux ou trois jours n'a pas pour finalité de permettre
aux autorités d'approfondir leur enquête et de réunir les indices graves et concordants
susceptibles de conduire à la mise en examen des suspects » (§ 61). De son côté, la Cour
de cassation rappelait encore récemment que la garde à vue est une mesure d'enquête,
v. Cass. crim., 10 février 2016, n° 15-86.503.
29. Pour une analyse approfondie de la jurisprudence, v. Lesclous V., « Un an de droit de
la garde à vue », Dr. pénal 2016, Chron. n° 8, chronique presque exclusivement consacrée
à la question de la nullité, ce qui est significatif.
30. Cass. crim., 2 février 2016, n° 14-88.541.
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