Contextes - Le formalisme - 48

LA FAMILLE

deux ou trois personnes105. À la fin du Moyen Âge, cette forme pouvait
être qualifiée de « publique » en raison de la présence de témoins au rang
desquels figurait une personne qualifiée - notaire royal, seigneurial ou
apostolique et plus rarement, en certains lieux, le curé de la paroisse du
testateur. Cette formalité de la dictée supposait alors, comme le relevait
Philippe de Beaumanoir († 1296), que le disposant, sain d'esprit et d'entendement, pût déclarer oralement ses dernières volontés106.
Cette diversité des formes testamentaires s'observe encore aux Temps
modernes, après la rédaction officielle des coutumes sous l'autorité royale.
Il existait au xvie siècle, dans la France septentrionale, près de cent cinquante
types d'actes à cause de mort. Par-delà cette apparente diversité, deux
formes prédominaient toutefois : d'une part, le testament olographe, acte
purement privé, était rédigé, signé et daté de la main du disposant ; d'autre
part, le testament authentique, ou solennel, était quant à lui dicté par le
testateur en présence de témoins, rédigé par une personne publique comme
le notaire ou le curé, avant que lecture en fût donnée au disposant107. À la
charnière du xve et du xvie siècle, la rédaction des coutumes entraînait alors,
dans son sillage, une évidente solennisation des formes testamentaires. En
témoignent notamment les conditions de forme requises ad validitatem
dans la plupart des coutumes ainsi que le lourd formalisme du testament
authentique.
Cette solennisation du testament authentique est la conséquence de l'intervention directe des commissaires royaux dans la procédure de rédaction
des coutumes. À Paris, par exemple, le premier projet de coutume présenté
en 1507 ne contenait aucune disposition relative à la forme des testaments.
Comme l'indiquait Simon Marion dans ses Observations sur la coutume de
Paris, on proposait de s'en rapporter aux formalités prescrites par le droit
canonique108. Peu favorables à une telle liberté des formes, les commissaires
du roi décidèrent alors d'introduire un article 96 qui prescrivait un formalisme contraignant pour le testament authentique. Pour qu'un testament
fût réputé authentique ou « solennel », la coutume de Paris, officiellement
105. Petitjean M., « L'acte à cause de mort dans la France coutumière du Moyen Âge à
l'Époque moderne », loc. cit., p. 102 et Descamps O., « Les formes testamentaires de l'époque
médiévale jusqu'à la période présente en France », loc. cit., p. 52. À Paris, au Moyen Âge, si
le testament nuncupatif devant témoins était valable, il était d'usage qu'un écrit fût dressé,
soit par le testateur lui-même, soit par quelques voisins ou officier public (Martin O.,
Histoire de la coutume de la prévôté et vicomté de Paris, 1972, Paris, Éditions Cujas, p. 526).
106. Philippe de Beaumanoir, Les coutumes de Beauvaisis, t. I, § 411, éd. cit., p. 195-196.
107. Petitjean M., « L'acte à cause de mort dans la France coutumière du Moyen Âge à
l'Époque moderne », loc. cit., p. 114-115.
108. Martin O., Histoire de la coutume de la prévôté et vicomté de Paris, op. cit., p. 538,
n. 3-4

Contextes - Le formalisme

Table des matières de la publication Contextes - Le formalisme