Contextes - Le formalisme - 96

LA FAMILLE

conditions de forme ont été requalifiées en condition de fond pour ne plus
les laisser sous l'emprise éventuelle de la loi étrangère du lieu de célébration.
Ainsi une loi du 24 août 1993 a inséré dans le Code civil un article 146-1
exigeant expressément la présence des futurs époux lors de la célébration
et fermant ainsi la porte à des mariages par procuration admis par des lois
étrangères. La Cour de cassation ne s'y est pas trompée. Elle a considéré
que cette exigence constituait désormais une condition de fond du mariage
régie en conséquence par la loi personnelle des époux24.
Mais ce sont sans doute les multiples aménagements successifs de la
procédure d'opposition à mariage ainsi que les conditions posées pour le
mariage des Français à l'étranger qui fournissent les meilleures illustrations
de ce nouveau formalisme conquérant. S'agissant du mariage des Français
à l'étranger, la loi du 14 novembre 2006 a introduit dans le Code civil un
chapitre nouveau entièrement consacré à la question et qui envisage d'une
part les formalités préalables qui doivent être respectées lorsque le mariage
est célébré à l'étranger par une autorité étrangère25, d'autre part la transcription d'un tel mariage sur les registres de l'état civil français. Au total,
ce ne sont pas moins de huit articles dont la longueur et le luxe de détails
impressionnent qui sont ainsi consacrés à ce sujet. On se demande s'il était
possible de faire plus lourd et plus complexe.
Quant à la procédure d'opposition à mariage, dont l'immense majorité des auteurs se demande si elle ne devrait pas être abrogée pour être
remplacée par de simples avis officieux, elle a trouvé, aux mains du ministère public, une nouvelle jeunesse. Le chemin a été semé d'embûches et le
législateur a dû souvent tempérer ses ardeurs sous le contrôle du Conseil
constitutionnel. Mais au bout du compte, les articles 175-1 à 176 du Code
civil organisent de façon minutieuse les conditions dans lesquelles le
Ministère public peut former opposition à un mariage.
Le formalisme des conventions matrimoniales n'est guère plus léger.
Cependant, il a toujours été mieux supporté, sans doute parce qu'on
s'éloigne des considérations purement personnelles pour se rapprocher
des questions patrimoniales.
Derrière un consensualisme de façade permettant aux époux de passer
« comme ils le jugent à propos »26 les conventions ayant pour objet de régir
leurs rapports patrimoniaux, se cache un formalisme lourd, conditionnant
précautions : possibilité pour l'officier de l'état civil de demander à s'entretenir séparément
avec chacun des époux ; audition du futur conjoint mineur hors la présence des ses représentants légaux et de son conjoint.
24. Cass. 1 re civ., 15 juill. 1999, Bull. civ., I, n° 244, D. 2000, somm. 414, obs.
Lemouland J.-J., Rev. crit. DIP 2000, p. 207, note Gannagé L.
25. C. civ., art. 171-2 à 171-4.
26. C. civ., art. 1387.

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