Systèmes Cours - Droit du marché intérieur européen - 5e - 108

Droit du marché intérieur européen

purement interne - c'est-à-dire dont tous les éléments se cantonnent à
l'intérieur d'un seul État membre - qui le priverait de la possibilité
d'invoquer les dispositions du droit de l'Union relatives à la libre circulation
des personnes (arrêt du 28 janvier 1992, Volker Steen, aff. C-332/90) et qui, de
surcroît, l'amènerait, le cas échéant, à subir une « discrimination à rebours »
- c'est-à-dire un traitement moins favorable que celui dont bénéficient les
ressortissants des autres États membres - que tolère le droit de l'Union (par
ex. arrêt du 16 février 1995, Aubertin, aff. C-29 à 35/94, à propos de l'exigence
d'un diplôme pour les coiffeurs français, alors que les autres ressortissants
communautaires peuvent en être dispensés).
Concrètement, il lui faut donc être présent sur le territoire d'un autre
État membre, ou vouloir y accéder, comme l'impliquent expressément les
dispositions de l'article 49 du TFUE - ayant trait au droit d'établissement -
et implicitement celles de l'article 45 du même traité - relatives à la libre
circulation des travailleurs. L'évolution récente tend cependant à réduire le
« dogme » de l'inapplicabilité des normes communautaires aux situations
internes1, s'alignant ainsi sur une tendance initiée, comme c'est souvent le
cas, dans le domaine des marchandises (v. supra, nº 34 et 49). Après avoir
dans un premier temps refusé de se prononcer dans des cas où tous les
éléments se cantonnent à l'intérieur d'un seul État membre (à propos du
monopole légal de placement des travailleurs dans un État, alors que tous
les éléments du litige se rattachaient en l'espèce à cet État : arrêt du
16 janvier 1997, Unita socio-sanitare locale, aff. C-134/95), la Cour s'est
ensuite alignée sur sa jurisprudence Guimont (arrêt du 5 décembre 2000,
aff. C-448/98) en matière de marchandises à propos de mesures
indistinctement applicables, suggérant au juge national la voie qui lui
permettrait de résorber lui-même les discriminations à rebours, pour
autant qu'il dispose en droit interne d'instruments adéquats. À cet effet la
Cour a fourni l'interprétation sollicitée, selon la formule désormais
classique, « à l'attention du juge de renvoi dans la mesure où son droit
national imposerait de faire bénéficier un ressortissant (national) des
mêmes droits que ceux qu'un ressortissant d'un autre État membre tirerait
du droit de l'Union dans la même situation » (arrêt du 30 mars 2006, Servizi
Ausiliari, Dottori Commercialisti, aff. C-451/03, à propos d'expertscomptables italiens qui invoquaient le droit communautaire pour contester
le bien-fondé de la législation qui les évince d'une activité économique -
celle de conseil fiscal -, cette activité étant réservée par la législation
nationale aux seuls centres d'assistance fiscale).

1. F. PICOD, « Libre circulation et situation interne », RAE, 2003/2004/1, p. 47 ; L. POTVIN-SOLIS,
« Principe général de non-discrimination et situations purement internes », Les principes
généraux du droit de l'Union européenne, 50e anniversaire des Cahiers de droit européen,
Bruylant, 2015 ; F. MARTUCCI, « Situations purement internes et libertés de circulation », in
E. DUBOUT et A. MAÎTROT DE LA MOTTE (dir.), L'unité des libertés de circulation-in varietate
concordia ? Bruylant, 2013, p. 43.

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