Systèmes Cours - Droit du marché intérieur européen - 5e - 59

L'élimination des entraves de nature non pécuniaire

Cour a ainsi jugé contraire à l'ex article 28 TCE la loi suédoise interdisant les
importations directes de boissons par des particuliers (arrêt du 5 juin 2007,
Rosengren, aff. C-170/04). De même, la Cour a condamné sur la base de
l'article 34 TFUE le monopole de la vente au détail des produits du tabac
(arrêt du 26 avril 2012, ANETT, aff. C-456/10) en centrant son analyse sur
l'accès au marché (v. ci-dessous). L'obligation d'obtenir une autorisation
pour effectuer des ventes - obligation dont s'était affranchi Visnapuu en
écoulant des boissons alcooliques via internet au détriment du monopole
d'Alko - est également analysée sous l'angle de l'article 34 TFUE et, plus
spécifiquement, de l'arrêt Keck. La Cour conclut ici aussi à une mesure
d'effet équivalent, mais au terme d'une réécriture contestable de cette
jurisprudence4 (arrêt du 12 novembre 2015, V. Visnapuu, aff. C-198/14).
Enfin, dans un contexte un peu différent, la vente au détail de boissons
alcooliques en Suède est revenue sur le devant de la scène à propos de la
mise en place d'un prix minimum par unité d'alcool (MPU). La Cour estime
que, en empêchant que le prix de revient inférieur des produits importés
puisse se répercuter sur le prix de vente au consommateur, la
réglementation est susceptible d'entraver l'accès au marché britannique
des boissons alcoolisées légalement commercialisées dans les autres
États membres (arrêt du 23 décembre 2015, The Scotch Whisky Association,
aff. C-333/14). On relèvera que la Cour, contrairement aux conclusions de
l'avocat général, n'a pas fait dans cet arrêt le détour par Keck et Mithouard.
La notion de mesures d'effet équivalent à l'importation a au total fait
l'objet non d'un revirement - la définition donnée par la Cour de justice
dans l'arrêt Dassonville (préc.) a été expressément reprise dans l'arrêt Keck
et Mithouard (préc.), lequel reprend aussi, en partie, la définition donnée par
la Commission dans sa directive 70/50 du 22 décembre 1969 (préc.) - mais
d'un « recentrage » motivé par le souci d'éviter qu'il ne soit porté atteinte de
façon excessive au pouvoir des États d'édicter des réglementations
commerciales, en l'absence de dispositions communes ou du moins
harmonisées. L'abondance de la jurisprudence postérieure à l'arrêt Keck et
Mithouard5 permet toutefois de douter du résultat atteint, alors que la
complexité des raisonnements tenus par la Cour et des solutions retenues
par elle, sur la base de la définition donnée dans cet arrêt, en combinaison
avec la précédente, s'est trouvée manifestement accrue.
Cependant une tendance, déjà mise en évidence dans les années quatrevingt-dix, du recours au critère de l'accès au marché comme critère central
d'appréciation de l'entrave (voir notamment, à propos de modalités de
vente : arrêt du 13 janvier 2000, Tk Heimdienst c/ Schutzverband, préc., arrêt
du 8 mars 2001, International Gourmets, préc. ou encore arrêt du 23 février
4. C. BLUMANN, ADUE 2015, Chronique marchandises, p. 682. Pour une étude complète voir
L. GRARD, « Monopoles nationaux », in C. BLUMANN (dir.), Introduction au marché intérieur.
Libre circulation des marchandises, Commentaire Mégret, 3e éd., Bruxelles, 2015, p. 410 et s.
5. R. KOVAR, « Dassonville, Keck et les autres : de la mesure avant toute chose », RTDE 2006,
nº 2, p. 213.

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