Exercices pratiques - Instruments de crédit et de paiement - 10e - 76

Instruments de crédit et de paiement

B. Quels sont les effets de la négligence ?
Examinons ces incidences, d'une part, sur les actions cambiaires du porteur, d'autre
part, sur ses actions de droit commun.

1. Les actions cambiaires : une déchéance partielle
Le porteur ayant présenté tardivement au paiement est déchu de ses recours
cambiaires contre les signataires de la lettre, endosseurs et tireur. Le principe est
sévère mais l'article L. 511-49 du Code de commerce y apporte des atténuations
qui visent les deux acteurs principaux de la traite, tiré et tireur.
- Le tiré, lorsqu'il est accepteur, reste tenu cambiairement, même à l'égard du porteur
négligent (art. L. 511-49, II) ; il s'est reconnu volontairement débiteur cambiaire et les
formalités de présentation ne sont pas prescrites en sa faveur.
- Quant au tireur, il ne peut opposer sa négligence au porteur que s'il a fait provision.
Ainsi évite-t-on qu'il s'enrichisse injustement. Appartient-il alors au porteur de prouver
que le tireur n'a pas fait provision s'il veut pouvoir le poursuivre en garantie ? Ce
problème de preuve est réglé par l'article L. 511-49 qui fait clairement peser sur le
tireur la charge de prouver l'existence de la provision : « la déchéance n'a lieu à l'égard
du tireur que s'il justifie qu'il a fait provision à l'échéance ». Si le tiré est accepteur,
le tireur peut-il invoquer à son avantage la présomption d'existence de la provision
établie par l'article L. 511-7 alinéa 4 du Code de commerce ? Le lui accorder conduirait
à renverser la charge de la preuve en obligeant le porteur à faire la démonstration
contraire et contredirait les termes de l'article L. 511-49 du Code de commerce. Cette
présomption ne jouera que dans les rapports entre le tiré accepteur et les endosseurs
successifs ainsi que le tireur resté porteur (Com. 24 oct. 1977, Bull. n° 241 ; 4 juin 1991,
Bull. n° 207). Le porteur négligent conserve donc son recours contre le tireur tant que
ce dernier ne prouve pas que la provision existe à l'échéance.
- Les avaliseurs, enfin, sont tenus dans les mêmes termes que le débiteur qu'ils
garantissent : les donneurs d'aval du tiré accepteur ou d'un tireur qui n'a pas fait
provision restent donc engagés malgré la négligence du porteur (v. Sujet 6 ; pour
une illustration, v. Com. 26 janv. 2010, n° 09-65040, inédit).
Dans notre cas l'endosseur, SA PEC, est ainsi libéré cambiairement. La société BX,
tiré accepteur, ne l'est pas, ni son avaliseur. Le tireur EMM devra prouver qu'il a bien
livré la marchandise s'il veut opposer sa négligence au porteur.
Remarque : Même s'il n'est pas négligent, le porteur doit penser aussi que les actions
cambiaires sont fragilisées par des prescriptions abrégées (3 ans contre l'accepteur, 1 an
contre les endosseurs et le tireur ; C. com., art. L. 511-78).

2. Les actions de droit commun : leur maintien
La négligence du porteur ne produit d'effets que dans les rapports de nature cambiaire.
Elle laisse donc subsister, intactes, les actions fondamentales. La Banque ZOÉ conserve
ainsi l'action contre son endosseur, SA PEC, au titre du contrat de crédit d'escompte.
Elle dispose, par ailleurs, du droit au paiement de la créance de la provision contre le
tiré, créance qui lui a été transmise lors de l'endossement, avec toutes ses qualités et
tous ses vices. Ces actions obéissent au droit commun, tant en ce qui concerne leur
prescription que l'opposabilité, au poursuivant, de tout moyen de défense.

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