Les Mélanges - Mélanges en l'honneur de Jérôme Huet - 124

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LA VENTE AUX ENCHÈRES PUBLIQUES DES MEUBLES INCORPORELS

De l'an IX à 1945
La première période est celle qui s'écoule de l'établissement des commissairespriseurs (lois du 27 ventôse an IX et 20 avril 1816)2 à l'ordonnance n° 45-2593
du 2 novembre 1945 relative au statut des commissaires-priseurs.
Pendant cette période la compétence territoriale et d'attribution des commissaires-priseurs est fixée par l'article 1er de la loi du 27 ventôse an IX (17 mars
1801)3. Ce texte dispose :
« À compter du 1er floréal prochain, les prisées des meubles et ventes publiques
aux enchères d'effets mobiliers qui auront lieu à Paris seront faites exclusivement
par des commissaires-priseurs vendeurs de meubles.
Ils auront la concurrence pour les ventes de même nature qui se feront dans le
département de la Seine »4 (mis en italique par nous).
On s'est interrogé alors sur le point de savoir si l'expression « effets mobiliers »
comprenait les meubles incorporels.
Si l'on avait interprété ces mots à la lumière des articles 529 et 535 du Code
civil5, ils auraient dû être entendus comme comprenant les meubles incorporels
et les commissaires-priseurs auraient dû avoir le droit de vendre les meubles
incorporels. C'est la solution inverse qui a été retenue. Celle-ci s'appuyait sur le
raisonnement suivant : la loi du 27 ventôse an IX (18 mars 1801) est antérieure
2. Le roi Henri II créa en février 1556 des offices de priseurs-vendeurs des biens
meubles « délaissés par les défunts » et « saisis par autorité de justice », qui deviendront sous
Louis XV en février 1771 des jurés-priseurs. Le décret du 21-26 juillet 1790 supprima en
province les offices de jurés-priseurs créés par l'édit de 1771 et le décret du 17 novembre 1793
les offices parisiens. Dès lors ce sont les notaires, les greffiers et les huissiers qui ont été autorisés
à faire les ventes de meubles qui étaient faites par les jurés-priseurs. Pour faire cesser les abus et
désordres qui régnaient alors dans les ventes publiques, il fut établi des commissaires-priseurs,
d'abord à Paris (loi du 27 ventôse, an IX portant établissement de quatre-vingts commissairespriseurs vendeurs de meubles à Paris) puis dans les départements (loi du 28 avril 1816 qui
établit des commissaires-priseurs dans les départements ; ordonnance du 26 juin 1816 qui
établit, en exécution de la loi du 28 avril 1816, des commissaires-priseurs dans les départements).
3. Chanard A., L'étendue du monopole des commissaires-priseurs, thèse 1925, Aix ;
Constant C., Manuel pratique des commissaires-priseurs et autres officiers vendeurs de meubles,
3e éd par Heraud et Gaultier, 1927, Rousseau ; Maurice R., Le commissaire-priseur et les ventes
publiques de meubles, thèse, 1971, LGDJ.
4. L'article 89 de la loi de finance du 28 avril 1816 étend les attributions des commissairespriseurs de Paris à leurs collègues de province dans les termes suivants : « Il pourra être établi,
dans toutes les villes et lieux où sa Majesté le jugera convenable, des commissaires-priseurs dont
les attributions seront les mêmes que celles des commissaires-priseurs établis à Paris par la loi du
27 ventôse, an IX. Les commissaires n'auront conformément à l'article 1er de ladite loi, le droit
exclusif que dans le chef-lieu de leur établissement. Ils auront, dans tout le reste de l'arrondissement
la concurrence avec les autres officiers ministériels, d'après les lois existantes ».
5. L'article 529 du Code civil dispose : « Sont meubles par la détermination de la loi les
obligations et actions qui ont pour objet des sommes exigibles ou des effets mobiliers, les actions
ou intérêts dans les compagnies de finance, de commerce ou d'industrie, encore que des
immeubles dépendant de ces entreprises appartiennent aux compagnies » (mis en italique par
nous). L'article 535 du Code civil énonce : « L'expression "biens meubles", celle de "mobilier
ou d'effets mobiliers", comprennent généralement tout ce qui est censé meuble d'après les
règles ci-dessus établies », c'est-à-dire celles relatives aux biens meubles par nature, par
détermination de la loi et par anticipation.
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