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LE STREET ART ET LA PROPRIÉTÉ PUBLIQUE

expositions ». Cette obligation - qui a récemment donné lieu à un contentieux très médiatique tiré de l'installation dans des hôtels de ville et de
département de crèches de Noël15 - ne saurait être oubliée dans le débat qui
nous intéresse, et ce quand bien même le street art, en France tout du moins,
maintient aujourd'hui à distance l'iconographie religieuse. En effet, cette
neutralité religieuse propre à la loi de 1905 ne recoupe pas exactement la
neutralité générale du service public, dans la mesure où elle concerne, selon
les distinctions opérées récemment par le Conseil d'État, non seulement le
« bâtiment public siège d'une collectivité publique ou d'un service public »,
mais aussi, plus largement, tout « autre emplacement public », ce qui renvoie
aux « voies publiques » et aux « lieux ouverts au public en général ».
Les conséquences exactes de l'application de ces deux neutralités sur
les œuvres de street art réalisées sur des propriétés publiques ne sont pas
aisées à déterminer, néanmoins. C'est évidemment au sujet de la neutralité politique que les débats les plus aigus risquent de se cristalliser. On
sait en effet que cette obligation est d'ores et déjà la cause d'un contentieux important, quoique peu étudié car ultra-local, entre responsables
de collectivités territoriales et préfets au sujet du déploiement, sur des
édifices publics, de banderoles, calicots ou autres draps peints à l'occasion
de mouvements sociaux16. Ainsi, en parcourant la presse régionale, il est
frappant d'observer que les préfets menacent régulièrement de déférer au
juge administratif, et défèrent effectivement parfois, les décisions de maires
d'apposer des banderoles - souvent faiblement vindicatives, pourtant - sur
les façades de leurs mairies, comme ce fut par exemple le cas ces dernières
années pour une banderole déployée à Tarnos (Landes) afin de dénoncer
la baisse des dotations de l'État (banderole « Hold-up de 1,3 million sur
le budget communal, ne nous laissons pas tondre, j'aime ma commune »)
ou à Oloron (Pyrénées-Atlantiques) pour protester contre la réforme des
retraites (banderole « La retraite à 60 ans à taux plein, c'est possible »). Le
cas récent le plus polémique, qui aurait d'ailleurs tout à fait pu concerner
une œuvre de street art, est celui de la banderole apposée sur le fronton
de la mairie de Stains (Seine-Saint-Denis) en soutien à Marwan Barghouti,
figure de la cause palestinienne, emprisonné en Israël (banderole « Stains
s'engage pour la paix. Libérez Marwan Barghouti, le Mandela palestinien »). Début 2016, le préfet défère au tribunal administratif de Montreuil
15. CE, 9 nov. 2016, n° 395122 et n° 395223, Commune de Melun c. Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne (1re déc.), Département de la Vendée
c. Fédération de la libre-pensée de Vendée (2 nde déc.), D. 2016, p. 2341, obs. M.-C. de
Montecler, p. 2456, entretien avec D. Maus ; AJDA 2016, p. 2375, chron. L. Dutheillet de
Lamothe et G. Odinet ; AJCT 2017, p. 90, entretien avec F. de la Morena et M. Yazi-Roman.
16. En ce sens, v. la réponse du ministre de l'Intérieur à la question écrite n° 54347 du
député Éric Raoult : JO, 28 déc. 2010, p. 14018.
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