Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ? - 209

AURÉLIE CAPPELLO

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B. Les obstacles à la mise en cause des hébergeurs
Deux grands obstacles à la mise en cause des hébergeurs coexistent
aujourd'hui.
Le premier obstacle concerne la dénonciation du caractère illicite de
l'activité ou de l'information. Rappelons que les hébergeurs ne sont pas
responsables lorsqu'ils n'avaient pas connaissance du caractère illicite de
l'activité ou de l'information ou s'ils ont agi promptement pour les retirer
lorsqu'ils en avaient connaissance26. Dans ce cadre, la connaissance du caractère illicite de l'activité ou de l'information est présumée lorsqu'il a fait
l'objet d'une dénonciation27. Or, l'article 6 de la loi pour la confiance en
l'économie numérique énumère les conditions de cette dénonciation qui
se révèlent être très strictes : toute personne peut y procéder mais il est
nécessaire de notifier de nombreuses informations (date de la notification,
identité, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du notifiant, description et localisation précise de l'information ou de l'activité
concernée, motifs pour lesquels le contenu doit être retiré comprenant la
mention des dispositions légales et des justifications de fait, copie de l'information ou de l'activité concernée ou preuve de ce que l'éditeur n'a pu être
contacté). En outre, le fait de dénoncer le caractère illicite de l'information
ou de l'activité alors que ce n'est pas le cas, simplement pour en obtenir le
retrait ou en faire cesser la diffusion, constitue une infraction et est puni
d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Autant d'éléments qui n'encouragent pas à procéder à une telle dénonciation. Pour cette
raison, le rapport d'information du Sénat propose aujourd'hui d'alléger les
conditions de la dénonciation et de supprimer l'incrimination de dénonciation abusive28. Toutefois, il n'est pas certain que cette proposition mérite
d'être retenue. Non seulement les poursuites pour dénonciation abusive
sont très rares, mais encore les conditions strictes de la dénonciation et
l'infraction de dénonciation abusive sont, en réalité, des garanties de la
liberté d'expression : il s'agit de s'assurer que les individus ne puissent
pas bloquer la « cyberexpression » pour des motifs abusifs, notamment

26. Article 6 I 3°.
27. Article 6 I 5. Il est à noter que le Conseil constitutionnel a émis une réserve d'interprétation sur ce point (Cons. Cons. 10/06/2004, n° 2004-496 DC) : « Considérant que les 2 et 3
du I de l'article 6 de la loi déférée ont pour seule portée d'écarter la responsabilité civile et
pénale des hébergeurs dans les deux hypothèses qu'ils envisagent ; que ces dispositions ne
sauraient avoir pour effet d'engager la responsabilité d'un hébergeur qui n'a pas retiré une
information dénoncée comme illicite par un tiers si celle-ci ne présente pas manifestement
un tel caractère ou si son retrait n'a pas été ordonné par un juge ».
28. Propositions n° 12 et 13.

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