Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ? - 226

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LES SANCTIONS PÉNALES

nationale supprimait ce point : sans doute la question de l'application des
sanctions civiles en matière de presse est-elle momentanément écartée.
Les regards se tournent alors naturellement de nouveau vers les sanctions
pénales. À leur égard, il semble que deux questions doivent être immédiatement distinguées. D'abord, que penser de la nature pénale des sanctions
(I) ? C'est-à-dire, de ce principe d'un recours massif aux sanctions pénales ?
Ensuite, et si l'on admet ce recours aux sanctions pénales, que penser de leur
contenu, de leur nature (II) ? L'amende, l'emprisonnement et les quelques
peines complémentaires concernées sont-elles « appropriées » au contentieux du droit des médias ?

I − RÉFLEXIONS SUR LA NATURE PÉNALE
DES SANCTIONS
Le recours aux sanctions pénales pour les abus de la liberté d'expression est massif et d'ailleurs quasi-exclusif. Pour ne citer que la loi du
29 juillet 18814, les articles 3, 9, 10, 11, 12, 13, 15, 17, 23, 24, 24 bis, 27,
29, 35 ter, 35 quater, 37, 38, 38 ter, 39, 39 bis, 39 quater, 39 quinquies, 39
sexies et 40 en contiennent.
Dans une première vue, ce recours pourrait surprendre. La loi sur la
presse est une loi de faveur5, visant à ménager un espace de liberté. Dans
ces conditions, la pénalisation de certaines expressions, dont on sait qu'elle
manifeste la réprobation sociale la plus élevée, ne contredit-elle pas cette
finalité ? La réponse semble claire et l'ambiguïté devrait être rapidement
levée : ce sont les « abus » de la liberté d'expression qui sont seuls réprimés6
− en conformité à l'article 11 de la Déclaration de 17897. Cependant, et sous
cet aspect, deux remarques interrogent sur les risques et, plus largement,
sur la légitimité de la nature pénale des sanctions.

4. Le Code pénal en contient d'autres : pour prendre une illustration qui ne sera pas reprise
par la suite, V. en matière de terrorisme les articles 421-2-5, 421-2-5-1 et 421-2-5-2.
5. V. en ce sens, et dans ce même ouvrage, la contribution de Diane de Bellescize.
6. V. en ce sens, argumentant son refus de renvoyer une QPC portant sur l'article 24 de
la loi de 1881 : Cass. crim., 30 mars 2016, n° 15-84511 ; et, plus tôt, au sujet de l'article 24
bis le raisonnement suivi par : Cons. const., 8 janvier 2016, n° 2015-512 QPC.
7. « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux
de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de
l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi. » (Nous soulignons). Les articles 10
de la Convention européenne des droits de l'homme et 19 du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques prévoient tous deux, également, l'hypothèse d'abus légitimement
sanctionnés.

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