Grands Colloques - La réécriture de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 : une nécessité ? - 49

EMMANUEL DREYER

7. Il reste à déterminer si les motifs justifiant l'exclusion du régime de
faveur prévu par la loi de 1881 justifient également, mais à l'inverse, l'application du régime de rigueur propre à la lutte antiterroriste lorsque sont
poursuivis des propos provocants ou apologétiques.

II − L'APPLICATION DE LA PROCÉDURE
ANTITERRORISTE
8. L'originalité du mouvement auquel on assiste en matière de provocation et apologie du terrorisme tient au fait qu'il écarte a priori l'application
du droit commun. À la différence des hypothèses antérieures, c'est un
régime spécial de poursuite qui a vocation à s'appliquer. Il figure aux
articles 706-16 et s. du CPP. À titre d'exemple, le parquet et les juridictions
parisiennes disposent d'une compétence concurrente à celle du parquet
et des juridictions territorialement compétentes (article 706-17). Des
possibilités de dessaisissement sont prévues en leur faveur. Par ailleurs,
des actes d'enquête peuvent éventuellement être effectués anonymement
(article 706-24). D'autres actes peuvent être accomplis selon le régime
dérogatoire applicable à la criminalité et délinquance organisées (même
si l'acte de terrorisme visé par l'article 706-73, 10°, n'a pas été commis
en bande organisée). Il en va notamment ainsi de la surveillance que les
OPJ peuvent mener sur l'ensemble du territoire (article 706-80), d'opérations d'infiltrations (article 706-81) et d'enquêtes sous pseudonyme
(article 706-87-1). Par ailleurs, assez curieusement, un procureur de la
République peut autoriser les services de police judiciaire spécialisés dans
l'antiterrorisme à poursuivre pendant 48 heures à compter de la délivrance
de son réquisitoire introductif, c'est-à-dire nonobstant la saisine d'un juge
d'instruction, des opérations de surveillance sur l'ensemble du territoire
national (article 706-80), une infiltration (article 706-81), une interception
de correspondances (article 706-95 et 706-95-1), une captation de données
de connexion (article 706-95-4), une sonorisation et fixation d'images
(article 706-96), une captations de données informatiques (article 706-1021).
Le juge d'instruction peut, certes, y mettre fin à tout moment, mais il ne
prend pas l'initiative de ces mesures. Enfin, la détention provisoire est
susceptible d'atteindre 6 mois en matière correctionnelle, renouvelable
sur décision du juge des libertés et de la détention par périodes de 6 mois,
dans la limite en principe de 2 ans (article 706-24-3). Pour mémoire, on
rappellera qu'elle est en principe ordonnée pour une durée de 4 mois en
matière correctionnelle, les prolongations dans la limite d'un ou deux ans

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